Dans le contexte politique actuel, la forte progression des partis politiques qui s’opposent au soutien à l’Ukraine est attendue lors des prochains scrutins régionaux dans le Brandebourg. En lien avec cette situation, l’Institut de Kiel pour l’économie mondiale (IfW Kiel) a récemment publié un rapport préoccupant concernant les dépenses militaires de l’Allemagne. Ce rapport risque d’influencer le débat sur le budget de 2025 qui sera bientôt en discussion au Bundestag.
Le rapport fait une critique sévère de l’augmentation des dépenses militaires effectuées par Berlin depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022. Il met en évidence le contraste entre les engagements pris lors de ce moment très émotionnel et l’argent réellement déboursé. En effet, lors d’un discours mémorable au Bundestag, le 27 février 2022, le chancelier Olaf Scholz déclarait que nous avions entamé une ère nouvelle. Il affirmait alors clairement la nécessité d’investir davantage dans la sécurité du pays pour garantir la liberté et la démocratie, en visant la constitution d’une armée fédérale haute performance, avancée technologiquement et orientée progressiste pour la protection efficace du pays.
Selon les spécialistes de l’Institut de Kiel, deux ans et demi plus tard, les résultats sont décevants. Ils soulignent que l’Allemagne n’a pas significativement augmenté ses investissements au cours des dix-huit mois suivant février 2022, et ne les a intensifiés qu’à la fin de 2023. Les auteurs prédisent qu’il faudrait un siècle pour que l’armée allemande retrouve le niveau d’équipement qu’elle disposait en 2004 – année de référence – tandis que l’industrie d’armement russe a considérablement augmenté ses capacités au cours des deux dernières années, surpassant même les pertes de matériel russe en Ukraine. En effet, Moscou pourrait reproduire l’ensemble de l’arsenal de l’armée allemande en un peu plus de six mois.
En 1992, l’Allemagne possédait 4 000 chars, contre 339 en 2021. L’effort tardif de l’Allemagne est jugé « insuffisant pour rattraper le retard », alors que le gouvernement fédéral lutte pour remplacer le matériel envoyé en Ukraine. En somme, « l’ère du changement n’est pour l’instant qu’un concept vide de sens », déclare Moritz Schularick, président de l’IfW Kiel. « Malgré les discours sur le changement d’époque (‘die Zeitenwende’), le fossé entre les capacités militaires de l’Allemagne et de la Russie ne cesse de s’élargir ».
L’institut a répertorié une diminution significative du matériel militaire de la Bundeswehr depuis les années 1990, dans les six principales classes d’armement. En 1992, l’Allemagne possédait 4 000 chars de combat, un chiffre qui est descendu à 2 400 en 2004 et a chuté à 339 en 2021. De plus, le nombre d’avions de combat a été réduit de moitié en deux décennies, pour atteindre 226. Ce « dividende de la paix » aurait permis à l’Allemagne d’économiser entre 400 et 600 milliards d’euros sur les trente dernières années.
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