Marine Martin a attendu 12 ans pour cette décision. Pendant ces 12 années, elle a lancé une révolte contre Sanofi afin de démontrer la culpabilité du groupe pharmaceutique dans l’affaire controversée de la Dépakine, un médicament anti-épileptique sur le marché depuis 1967 et à l’origine de malformations congénitales et de troubles neurologiques chez des milliers d’enfants de mères qui ont été soignées pendant leur grossesse.
Le lundi 9 septembre, un verdict a été rendu par le tribunal judiciaire de Paris, que Le Monde a eu l’occasion de consulter, condamnant le laboratoire français à lui payer, ainsi qu’à ses deux enfants, une compensation d’un montant de 284 867,24 euros. Selon la décision du tribunal, Sanofi est reconnu « coupable de ne pas avoir informé des risques de malformations et de troubles du développement neurologique liés à la Dépakine, d’avoir maintenu sur le marché un produit qu’elle savait défectueux et d’avoir fait preuve de négligence lors des grossesses de Madame Marine Martin entre 1998 et 2002 ».
Salomé, l’aînée, est née avec des difformités faciales et a souffert de problèmes cognitifs, visuels et dyspraxies. Florent, le plus jeune, est également né avec des malformations faciales, des mains et au niveau génital – nécessitant deux opérations chirurgicales -, il a montré des troubles de l’attention et du langage et a été diagnostiqué avec le syndrome d’Asperger. Étudiant à l’heure actuelle, il a toujours besoin d’une aide familiale de six heures par jour pour accomplir les tâches quotidiennes.
« Des milliers d’enfants, les principales victimes ».
La récente défaite judiciaire de Sanofi a été accueillie avec beaucoup de soulagement et de joie par Martine Martin, la fondatrice de l’Association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant (Apesac), qui regroupe maintenant plus de 8 000 adhérents. Selon Martin, Sanofi avait mis en avant la prescription de dix ans, mais a été rejeté par le tribunal. La condamnation de l’entreprise sur la base du défaut et de la faute liés à la Dépakine permettra à des milliers d’enfants, principalement touchés, de chercher justice alors qu’ils ne l’espéraient plus auparavant. Le tribunal de Nanterre avait déjà condamné Sanofi à verser des indemnisations à des victimes en 2022, mais seulement pour des cas plus récents.
Le valproate de sodium, un ingrédient actif dans la Dépakine, pourrait être à l’origine de malformations (cœur, reins, membres, doigts, visage…) chez 2 150 à 4 100 enfants et de troubles de développement neurologique (autisme, retard de langage…) chez 16 600 à 30 400 enfants, selon des estimations de l’Assurance-maladie et de l’Agence nationale de sécurité du médicament. Ces chiffres sont contestés par Sanofi.
Le tribunal a rejeté à la fois les demandes de prescription de Sanofi et de délai de décision. Charles Joseph-Oudin, l’avocat de Martine Martin et de l’Apesac, a déploré le fait que Sanofi ait engagé une guerre juridique sans fondement. Selon lui, il est maintenant crucial pour la compagnie de changer son attitude de déni et de mépris envers les victimes de ses produits.
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