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5 septembre 2024 14 h 44 min

Fomo étudiant : peur de manquer

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Estelle, 25 ans, a le souvenir qu’on lui a toujours recommandé de savourer ses 18 ans et ses premières années de formation, considérées comme les plus belles années de sa vie. Lorsqu’elle doit quitter son environnement familial pour s’installer à Lille pour son cursus universitaire d’anglais, elle souhaite suivre scrupuleusement ce conseil répété à maintes reprises.

Pour cela, elle participe aux diverses activités d’accueil et passe du temps avec des amis après les classes. Son but est alors clair : « Ayant vécu une adolescence sous contraintes où le droit de sortie m’était refusé, je tenais à découvrir des personnes partageant mes ressemblances dès mon arrivée à Lille. Je cherchais partout ces individus » Aiguillonnée par sa vie naissante, Estelle ne réalise pas qu’elle sort tous les jours. « Pendant plusieurs mois, je n’ai pas passé une soirée seule chez moi. Ma vie n’était plus qu’une succession de fêtes, cela consistait à être dehors et à être en compagnie. Des années plus tard, je constate que je suis devenue l’ombre de moi-même », réfléchit-elle, quelques années plus tard.

Au cours de la crise sanitaire du Covid-19, Estelle a pris conscience d’un problème spécifique qu’elle a rencontré. Après s’être retirée dans la maison familiale située en région nordiste pour se remettre de son rythme de vie étudiant tumultueux de trois ans, elle a commencé à éprouver un vide certain. « Malgré l’arrêt total du monde extérieur, j’éprouvais une crainte persistante de manquer une fête », dit-elle. Le malaise qu’Estelle a ressenti est identifié comme le syndrome du Fomo (Fear of Missing Out). « Le Fomo est l’angoisse de passer à côté de quelque chose, de ne pas être dans le vent » clarifie Maïté Tranzer, psychologue clinique à Paris. Dans le contexte de la vie universitaire, la tendance est d’assister aux fêtes « au cas où », afin d’éviter toute forme de regret de non-participation.

« Je me devais d’être en permanence partout. »

Maïté Tranzer explique que ce sentiment est ressenti par de nombreux étudiants pendant leur intégration universitaire. « Quand on commence ses études, on a souvent l’envie de coller aux normes par peur d’être marginalisé ou rejeté. Cela peut raviver de vieilles blessures. On a l’obsession d’être constamment présent pour renforcer son image, chercher de l’attention et être reconnu. »

Le Dr Julien Berthaud, sociologue et spécialiste en sciences de l’éducation à l’université de Bourgogne, a consacré ses recherches à l’intégration sociale des étudiants dans le milieu universitaire. Il définit cette phase comme un « processus bifurqué rempli de transitions et de ruptures entre le monde du lycée et celui de l’enseignement supérieur », deux sphères profondément distinctes. « Les jeunes étudiants transitent d’un cadre très structuré avec un emploi du temps fixe vers un environnement où ils doivent gérer eux-mêmes leur vie, généralement avec un réseau social différent de celui qu’ils avaient auparavant. L’étudiant a pour mission de construire son identité au sein de ce nouveau réseau tout en apprenant ses règles », explique-t-il.
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