Qu’est-ce qui lie les humains, les éléphants, les dauphins et les marmosets? Une récente publication dans la revue scientifique Science fournit la réponse. Un groupe de chercheurs d’Israël a découvert que les petits primates d’Amérique du Sud ont ce qu’ils appellent une « étiquette » vocale que leurs pairs utilisent pour les identifier, une caractéristique auparavant unique aux trois autres mammifères mentionnés ci-dessus.
David Omer et son équipe de l’Université Hébraïque de Jérusalem, ont recueilli des données audio d’interactions entre ces créatures, tant dans un environnement où ils pouvaient se voir ou non. Les chercheurs ont ensuite examiné ces vocalisations, en accordant une attention particulière aux ‘phee calls’. En recourant à l’intelligence artificielle pour analyser ces données, il a été déterminé que l’on pouvait identifier qui était visé par ces appels. La même étude a également révélé que les marmosets liées utilisent la même vocalisation pour se référer à un tiers, et un marmoset répond davantage à un pair qui fait appel à leur « nom ». L’équipe de recherche israélienne envisage de continuer à étudier d’autres espèces de primates en utilisant cette nouvelle méthodologie.
L’analyse n’a pas mis fin là. Elle a souligné l’aspect social de l’apprentissage de cette langue : les jeunes singes acquièrent les bases de leur parents. Par ailleurs, il a été observé que les individus engagent des conversations ou, au moins, communiquent alternativement, une aptitude peu fréquente chez les animaux. Les scientifiques israéliens n’ont pas réussi à déchiffrer le code utilisé par les singes. Pour le moment, ce qui code l’identité d’un interlocuteur dans les phee calls (durée, hauteur, intensité, etc.) reste inconnu. Cependant, l’article est considéré comme « très convaincant » par Emmanuel Chemla, linguiste, directeur de recherche au CNRS (ENS Ulm), spécialiste du langage animal, qui n’a pas participé à l’étude.
Environnement spécifique
Le chercheur français note cependant que bien que la totalité des résultats pourrait être parfaitement justifiée par la présence d’un nom dans les vocalisations, d’autres facteurs « légèrement différents » pourraient également influencer les résultats observés. « Par exemple, si un singe ouistiti est particulièrement perturbé, tout le monde pourrait lui parler en tentant de le rassurer », explique-t-il. « Si un individu est dominant, tout le monde lui parlera avec respect, etc. On peut détecter cela par l’intonation utilisée, mais cela ne signifie pas nécessairement qu’un nom a été prononcé. »
Les chercheurs israéliens n’emploient pas le terme de « nom » dans leur article. Cependant, ils pensent avoir clairement mis en évidence une « étiquette sonore individuelle », bien loin du seul cri de positionnement auparavant attribué aux phee calls. Ces particularités pourraient avoir émergé chez les ouistitis en raison de leur mode de vie unique : de petites communautés établies dans des canopées extrêmement dense.
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