Le débat a fait rage pendant l’été dans les couloirs des ministères concernant la question, des conseillers venant du secteur privé et recrutés sur des contrats, peuvent-ils être accusés de rétro-pédalage s’ils retournent aux entreprises qu’ils ont supervisées ou sur lesquelles ils ont donné des conseils dans le cadre de leur travail, de la même manière que leurs homologues fonctionnaires ?
Cette discussion sans précédent, née en juin dernier devant le tribunal correctionnel de Paris suite à l’affaire de Pierre-Yves Burlot – ancien membre du cabinet de la secrétaire d’État à la transition écologique et solidaire, Brune Poirson (2017-2020), accusé d’avoir rejoint un groupe industriel dont il avait été proche lorsqu’il était conseiller – a vu sa conclusion le mercredi 4 septembre, alors que l’on anticipait un nouvel essor ministériel.
Le tribunal a choisi une solution équilibrée, en dédouanant le conseiller, poursuivi pour rétro-pédalage, tout en précisant dans sa décision que les règles s’appliquent de la même manière aux salariés sous contrat et aux fonctionnaires. « Il est clairement indiqué dans le contrat de travail de M. Burlot qu’il était (…) un employé contractuel de l’Etat, donc un employé public », a jugé la présidente de la 32e chambre, Bénédicte de Perthuis. « Il était donc soumis aux règles de déontologie de la fonction publique – ce qu’il ne pouvait ignorer d’ailleurs puisqu’il a respecté ces règles », en déclarant son intention à ses supérieurs de rejoindre le groupe Séché Environnement, une entreprise spécialisée dans le stockage, le traitement et le recyclage des déchets, quelques mois après avoir travaillé comme conseiller technique en finance verte et économie circulaire. Des risques déontologiques sont en jeu.
La défense de Me Rémi Lorrain, qui a souligné que l’article 432-13 du code pénal n’indiquait pas explicitement les contractuels lorsqu’il définit le délit de « prise illégale d’intérêts » ou « délit de pantouflage », n’a pas réussi à convaincre les juges que les contractuels devraient être exemptés de cette infraction. Comme l’a précisé la présidente du tribunal, ils ont estimé que les contractuels publics étaient inclus dans la définition d’un agent de l’administration publique.
Suite à l’intégration de M. Burlot au groupe Séché au début de 2021, une enquête initiale a été ouverte par le Parquet national financier. L’enquête devait déterminer les déclarations faites par le trentenaire à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) afin qu’il puisse être embauché par Séché. Depuis août 2019, la loi stipule que toute intention de se réorienter vers le secteur privé par des collaborateurs ministériels dans les trois ans suivant leur départ doit être étudiée par l’autorité, pour qu’elle puisse évaluer les risques déontologiques et pénaux.
La suite de cet article est disponible uniquement pour les abonnés. Il reste encore 50,85% de l’article à lire.