Abel Quentin, romancier de moins de 40 ans, s’investit dans le traitement de sujets d’importance. Son premier roman nommé « Soeur » (publié par L’Observatoire en 2019) porte sur le terrorisme islamiste, un sujet sur lequel il détient une connaissance de première main en raison de sa carrière d’avocat où il a défendu des djihadistes. Il a ensuite écrit « Le Voyant d’Etampes » (également publié par L’Observatoire, mais en 2021), qui est une comédie sombre mettant en exergue la ‘cancel culture’. Son dernier ouvrage, « Cabane », apporte une réflexion sur la notion d’effondrement.
Nous vivons à une époque où la fin du monde tel que nous le connaissons est anticipée par les optimistes, tandis que les pessimistes craignent l’apocalypse. Il n’y a pas si longtemps, nous pouvions encore affirmer que depuis l’antiquité, l’être humain a toujours eu la tendance à penser que le passé était meilleur et que la fin du monde était proche. Cependant, aujourd’hui, cette peur millénariste et irrationnelle est devenue un fait scientifiquement prouvé et vécu au quotidien : même si on détourne le regard ou essaye de penser à autre chose, la réalité est que nous y sommes confrontés.
Face à un événement aussi colossal, c’est étonnant de voir que beaucoup de gens qui s’adonnent à l’écrit continuent de le traiter comme si tout allait bien, comme s’ils étaient au volant d’un véhicule sur le point de s’écraser contre un semi-remorque, mais persistaient à ajuster la radio pour trouver leur chanson favorite. Cependant, je dois reconnaitre l’injustice de cette affirmation: plusieurs individus qui écrivent sont effectivement à la recherche d’une manière de traiter ce sujet. Un ami éditeur m’a récemment fait part que la moitié des manuscrits soumis à lui étaient des dystopies. L’un des romans les plus saisissants est le récent « Ministère de l’avenir », écrit par Kim Stanley Robinson (Bragelonne, 2023) auteur de science-fiction. Il commence avec une description poignante d’une canicule en Inde, observee du point de vue des millions de victimes et narre ensuite le labeur d’une institution œuvrant à défendre les intérêts des futures générations – s’il en reste – face aux instigateurs de ces catastrophes.
Abel Quentin traite du même sujet mais de façon différente. Il se fonde sur un rapport réel, le rapport Meadows, mandaté par un groupe réflexion : le Club de Rome, et publié en 1972 sous le nom de « Les limites de la croissance (dans un monde fini) ». Il y a quelque cinquante-deux ans, le rapport Meadows avait correctement prédit ce qui se passe actuellement. Nous avions alors l’opportunité de contourner cette fatalité. Ce rapport a été lu, analysé même par le grand public. Il a suscité des inquiétudes chez certains. D’autres, en plus grand nombre, ont traité ses auteurs de pessimistes exagérés. On a fait la sourde oreille, on s’est tourné vers autre chose : les affaires comme d’habitude. L’éternelle histoire.
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