Nicolas Dhooge, avec confiance, questionne sa classe fictive de quatrième : « Pouvez-vous vous rappeler de la définition du théorème de Pythagore que nous avons abordé la semaine passée ? » pendant qu’il dessine une forme géométrique sur le tableau. Un étudiant assis au premier rang rétorque immédiatement : « Dans un triangle rectangle, le carré de l’hypoténuse équivaut à l’addition des carrés des deux côtés restants ». Ses mots font rire les autres étudiants. Ils sont 70, réunis dans une grande salle d’Alembert, à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), et ont en moyenne 33 ans.
Nicolas, sous l’œil vigilant d’un formateur de l’association le Choix de l’école, réitère les « mouvements d’un enseignant » pendant leur campus estival. Membre de la grande famille de Teach For All, cette association aide en France, depuis 2015, des diplômés et des jeunes professionnels aspirant à une carrière tardive dans l’enseignement.
Leur planning sur quatre semaines denses comprend des ateliers pratiques, comme « diriger l’attention des élèves » ou « donner des instructions précises ». Il y a également des initiations à la pédagogie spécifique à chaque matière, telles que « préparer une leçon » ou « apprendre à lire », suivies de conférences par des chercheurs sur des thèmes comme « orientation et autocensure » ou « psychologie de l’enfant ». Des échanges avec d’anciens élèves (les alumni) sont aussi prévus.
Le but est de les préparer à intégrer la sphère éducative en septembre en tant qu’enseignants contractuels. « C’est un peu comme recevoir une formation de premiers secours, je me sens comme si j’apprenais les techniques essentielles pour la salle de classe. Ce n’est qu’une fois sur le terrain qu’on comprend à quel point elles sont précieuses et comment on peut les personnaliser », explique Nicolas suite à son faux cours de mathématiques. Il y a encore quelques semaines, il s’occupait de la sécurité incendie et de la sécurité d’un hôpital en Ile-de-France, après avoir obtenu un bac + 5 en santé au travail et hygiène industrielle.
Motivation et réduction des revenus
Lorsqu’on leur pose la question, lui et ses confrères, sur la raison pour laquelle ils sont ici, et pourquoi ils ont choisi de changer radicalement de carrière, leur histoire se rapproche des nombreuses autres entendues sur les « pivotants ». Ces jeunes de la génération Y et Z parlent des études rigoureuses qu’ils ont suivies au lycée, et qui les ont conduits, souvent sans trop réfléchir, dans des grandes écoles de commerce ou d’ingénieurs, des instituts d’études politiques, ou parfois même d’établissements d’enseignement supérieur renommés… « Mais après quelques années de travail, on réalise qu’on n’est pas vraiment satisfait de notre activité professionnelle, qu’on ne comprend pas toujours l’objectif de notre travail », résume Robin, 27 ans, qui vient de quitter un cabinet de conseil en ressources humaines après y avoir passé quatre ans à la suite de son école de commerce.
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