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2 septembre 2024 21 h 11 min

« Sofiane Merabet: La France ignore le colonialisme »

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Sofiane Si Merabet, artiste, entrepreneur culturel de 43 ans et auteur du livre L’Arabe confus (Belfond, 236 pages, 20 euros), est également responsable du compte Instagram @theconfusedarab. Il se concentre sur l’exploration des identités et souvenirs arabes.

Il affirme que la nostalgie est un sentiment largement partagé parmi les communautés arabes. Selon lui, pour les Arabes, la nostalgie, ou « El Haneen », n’a pas une connotation négative. C’est un sentiment avec lequel ils grandissent, que ce soit au sein des sociétés arabes ou en diaspora. Pour la diaspora, la nostalgie est souvent liée à l’idée d’une patrie perdue. Cette nostalgie est associée à un sentiment d’appauvrissement civilisationnel, soutenu par le mythe de l’Andalousie et du panarabisme entre autres.

Sofiane vit aux Emirats arabes unis et considère que son exil est double. Son déménagement dans le Golfe était volontaire et en quête de redéfinition de son identité. Il a vu les enseignes arabes sur les bâtiments modernes pour la première fois en 2004, ce qui lui a permis de réaliser que l’arabe n’était pas seulement une langue du passé ou religieuse. Cette prise de conscience a aidé à panser les blessures liées à la négation et l’incompréhension de son identité arabe en France.

Je ressens une nostalgie doublée: elle vient d’une Algérie idéalisée et de la France que j’ai laissée derrière moi. Dans mon enfance, on m’a enseigné que l’Algérie fait partie intégrante de mon identité, qu’elle soit positive ou négative. Cette idée m’a apporté une curiosité accrue et une plus grande assurance dans l’établissement de mon identité. Ayant laissé la France il y a seize ans, je peux observer combien ma patrie a évolué. Ma nostalgie réside principalement dans l’image que la France reflétait au monde. Des termes tels que « République », « laïcité » et « égalité » avaient une réelle signification. En explorant à nouveau mes origines arabes, j’ai appris à chérir davantage mon identité française. Ni Jordan Bardella ni Eric Ciotti ne détiennent l’exclusivité sur la définition de ce qu’est la France.

Était-ce volontaire ou subi, votre départ de la France ?
En France, j’avais un emploi et des chances de progresser; tout allait pour le mieux, malgré la rencontre avec le fameux plafond de verre. J’ai quitté la France parce que je ressentais le besoin de vivre dans un pays arabe. Le Golfe a été une véritable révélation pour moi. J’y ai compris que les Arabes n’étaient pas condamnés à vivre dans la pauvreté et le sous-développement. Le Golfe évoque un monde précolonial, qui permet de transcender l’idée d’une adversité directe et civilisationnelle.

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