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2 septembre 2024 17 h 11 min

« Procès Dominique P. à Avignon, public »

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Le lundi 2 septembre, débutait à Avignon le procès sensationnel de Dominique P., un homme à la retraite suspecté d’avoir drogué sa femme et d’avoir organisé son viol par des dizaines d’individus inconnus durant une décennie. Le procès se tient publiquement, malgré les demandes de l’accusation pour qu’il se déroule à huis clos. Roger Arata, le président de la cour criminelle de Vaucluse, a annoncé que « les audiences seront publiques » après une interruption de trente minutes.

Par l’intermédiaire de l’un de ses défenseurs, Me Stéphane Babonneau, Gisèle P., la principale victime, âgée de 72 ans, a exprimé son souhait d’une totale transparence de la procédure judiciaire. Tout comme elle, les trois enfants du couple, également parties civiles au procès, ont demandé que les audiences soient publiques.

Cependant, le ministère public avait plaidé pour le huis clos, insistant sur le fait que les vidéos des faits, capturées par Dominique P., seraient obligatoirement diffusées et que cela nuirait à la dignité des personnes impliquées et craindrait que les audiences se transforment en spectacle.

Le procès, qui est inhabituel en raison du grand nombre d’accusés, soit 51 personnes allant de 26 à 74 ans, va donc se dérouler en pleine vue du public et des médias sur une période de quatre mois, jusqu’au 20 décembre. Les accusés ont individuellement partagé leur identité, profession et lieu de résidence devant la cour lundi matin.

Le procès abordera également le sujet de la « soumission chimique ».

« Mon adresse actuelle, c’est la prison », a rétorqué Dominique P., 71 ans, l’époux et principal défendeur, avec une pointe de provocation. Homme solide, aux cheveux blancs, vêtu d’un tee-shirt noir, il n’avait pas de masque protecteur contre le Covid, contrairement à d’autres défendeurs, dont trente-trois comparant en liberté.
Symbolique des problématiques liées à la soumission chimique, le procès a été marqué, avant même son commencement le lundi matin, par le rassemblement d’une quinzaine de membres de deux groupes féministes, Les Amazones d’Avignon et Osez le féminisme 84, devant le tribunal de justice d’Avignon. « Agresseurs, nous vous voyons, victimes, nous vous croyons », scandaient-elles, vêtues de noir.
« C’est un procès anormal », a déclaré l’avocat de deux défendeurs, Roland Marmillot, car les crimes commis « relèvent d’une pathologie mentale » de l’époux, mais également parce qu’il « veut entraîner avec lui cinquante autres accusés dans sa folie ».
Durant l’instruction, l’époux avait admis qu’il donnait, à l’insu de sa femme, de puissants anxiolytiques certains soirs. Principalement du Temesta. Il la faisait ensuite violer par des hommes trouvés sur Internet. Il a indiqué que les premiers crimes dataient de 2011, à l’époque où le couple vivait encore en région parisienne, et que ceux-ci se sont poursuivis jusqu’à l’automne 2020, suite à leur déménagement à Mazan en 2013.

/ »Mon client regrette ses actions et admet qu’elles sont inexcusables, » déclare Me Béatrice Zavarro, l’avocate de l’accusé, lors d’une conférence de presse le lundi matin. Elle souligne que son client est accro au comportement en question, admettant ses erreurs sans manifester aucune contestation depuis le début du processus judiciaire. Elle utilise également le terme de « suprémacie » pour décrire l’attitude de son client envers les femmes.

Les accusés dans ce dossier – qui incluent un pompier, un artisan, un infirmier, un gardien de prison et même un journaliste, qu’ils soient célibataires, mariés ou divorcés – sont apparus devant le tribunal en diverses occasions, allant jusqu’à six fois. Bien que selon les experts ils ne présentent pas de troubles psychiatriques notables, ils ont souligné un sentiment de « suprémacie » sur le corps féminin. Beaucoup persistent à dire qu’ils croyaient simplement participer aux fantasmes d’un couple libertin. Cependant, le mari a toujours affirmé que « tout le monde savait » que Gisèle P. était droguée et inconsciente.

Selon lui, chaque personne était libre d’agir et aurait pu quitter les lieux à tout moment. Les hommes ont été recrutés par le biais de coco.gg, un site de rencontre maintenant fermé et accusé d’abriter des prédateurs sexuels. Les directives étaient strictes pour éviter de réveiller la victime: pas de parfum ni d’odeur de cigarette, et l’obligation de réchauffer leurs mains sous l’eau chaude. »/

À l’âge de 68 ans, en automne 2020, Gisèle P. a découvert la vérité sur son mari lors de l’ouverture d’une enquête, après avoir vécu près de cinquante ans ensemble. Son époux avait été pris à filmer sous les robes des femmes dans un centre commercial. Son avocat, Me Antoine Camus, a révélé que ce serait passé en jugement serait « un choc effroyable » pour elle. Pour la première fois, elle serait confrontée aux abus sexuels qu’elle a subis pendant une décennie, dont elle n’a « aucun souvenir ». Son mari, Dominique P., non seulement prenait part aux abus, mais les filmait également sans demander de compensation financière en retour.

De plus, il a été associé à deux autres affaires par le département des « cold cases » à Nanterre, en Île-de-France. L’une concerne un assassinat suivi d’un viol à Paris en 1991, qu’il nie, et l’autre une tentative de viol en Seine-et-Marne en 1999, où son ADN l’a démasqué et qu’il avoue.