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1 septembre 2024 20 h 09 min

« Guerre Ukraine: Quarantaine blessés après bombardements »

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Consultez tous nos articles, nos éclaircissements, et reportages concernant le conflit en Ukraine. Vous trouverez des chroniques, des éclaircissements et des exégèses de « Le Monde ». Stanislav Asseyev, un journaliste ukrainien, a déclaré: « Ma grande crainte n’est pas la mort, mais l’angoisse d’être de nouveau capturé par les Russes ». L’Ukraine a mis à mal des infrastructures russes, et voici l’explication. L’attaque de l’Ukraine dans le sud de la Russie est une campagne militaire qui s’étend sur une longue période. Des négociations secrètes sans aboutissement ont eu lieu entre Moscou et Kiev. Rapportant des moments de la vie quotidienne, les derniers jours du service de maternité de Pokrovsk en territoire libéré sont documentés dans le Donbass. Nous répondons aux questions les plus souvent posées. Pour obtenir plus d’informations, cliquez sur une ligne. Refermer toutComment Moscou et Kiev se servent-ils des drones ?

La guerre des drones entre la Russie et l’Ukraine a connu une évolution sans précédent depuis quelques mois. Par rapport à un rapport publié en mai 2023 par un institut de réflexion britannique spécialisé en défense, les Ukrainiens perdaient environ 10 000 drones chaque mois sur le champ de bataille, soit plus de 300 chaque jour. Pour donner un ordre de grandeur, l’armée française possède un peu plus de 3 000 drones dans ses stocks.

Les Ukrainiens et les Russes utilisent principalement de petits UAV (véhicule aérien sans pilote, en anglais) d’origine civile, abordables et disponibles en grand nombre. Ils sont utilisés pour surveiller le champ de bataille et guider les troupes ou les tirs d’artillerie; certains sont également modifiés pour transporter de petites charges explosives, qui sont ensuite larguées sur des tranchées ou des véhicules blindés.

Les drones-kamikazes, bien que peu nombreux, sont primordiaux sur le champ de bataille. Ils sont embarqués avec une charge explosive et lancés au-dessus des fronts sans cible prédéfinie. Les Russes utilisent le Lancet-3 fabriqué localement ainsi que le Shahed-136, d’origine iranienne. Malgré l’absence d’une flotte navale conséquente, l’Ukraine contre-attaque en utilisant des navires sans équipage et des kayaks miniatures, contrôlés à distance et remplis d’explosifs (450 kilos de TNT).

La preuve de l’importance des drones dans leurs stratégies est que Ukrainiens et Russes ont mis en place des systèmes d’approvisionnement durables, en achetant des drones civils en quantité et en développant leur propre capacité de production. Contrairement à ses débuts au cours de la guerre de Donbass, l’industrie ukrainienne de production de drones a fait des progrès remarquables. En fin août, le Ministre ukrainien de la transformation numérique a même annoncé qu’une réplique du drone russe Lancet était prête à être mise en production sous le nom de Peroun, le dieu slave du tonnerre et de la foudre.

La Russie, de son côté, est contrariée par les sanctions occidentales limitant son accès aux composants électroniques. Cependant, les services de renseignement américains rapportent que la Russie aurait entamé la construction d’une usine pour fabriquer des drones-kamikazes similaires au Shahed-136 iranien, située dans la zone économique spéciale d’Alabouga.
Quant à l’état des stocks de missiles en Russie, il est extrêmement difficile, voire impossible, de le déterminer avec précision. L’intelligence ukrainienne fait régulièrement des déclarations à ce sujet, mais elles sont sujettes à débat.

Andri Ioussov, représentant des services de renseignements du ministère de la défense (GUR), a révélé, selon les informations rapportées par Liga.net que la Russie détenait approximativement 2 300 missiles balistiques ou de croisières avant le déclenchement de la guerre, avec plus de 900 restants en début d’année. Cela serait augmenté par des dizaines de milliers de missiles anti-aériens S-300 avec une portée estimée à 120 kilomètres, ainsi qu’un vaste arsenal de S-400, une version plus moderne avec une portée triple. Vadym Skibitsky, le second en commandement du GUR, suggérait en août que le nombre de missiles ayant une portée au-dessus de 500 kilomètres était d’environ 585.

Quant aux capacités de production, elles auraient augmenté pour atteindre une centaine de missiles balistiques ou de croisières chaque mois, comme l’affirment plusieurs spécialistes. En octobre, le GUR estimait cette production à 115 unités.

Il semble aussi que la Russie ait obtenu des missiles à courte portée de l’Iran et de la Corée du Nord, et qu’elle continuerait d’en acquérir. Reuters, citant plusieurs sources iraniennes, déclare que depuis janvier, date à laquelle un accord aurait été signé, 400 missiles iraniens de type Fateh-110 (portée de 300 à 700 kilomètres) auraient été livrés à la Russie. Nous ne savons pas combien de missiles nord-coréens ont été acquis par la Russie, mais 24 mises à feu en Ukraine ont été enregistrées entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, comme l’indique le procureur général Andriy Kostin. D’après l’analyse des experts sur les restes de missiles et les trajectoires, ces missiles seraient probablement des modèles KN-23 et KN-24, ayant une portée d’environ 400 kilomètres.

Et à propos des avions de combat F-16 ?

En début août, l’Ukraine a reçu ses premiers F-16, ces avions de combat américains dont Kiev avait tant besoin depuis le commencement du conflit. L’arrivée de ces avions était une excellente nouvelle pour Oleksandr Syrsky, le chef des forces armées ukrainiennes, qui a souligné leur valeur en termes d’efficacité et d’économie de vies militaires. Le président du Parlement, Ruslan Stefanchuk, n’a pas manqué de manifester sa joie face à l’arrivée de cet avion de combat, espérant renforcer considérablement les capacités militaires de l’Ukraine.

Cependant, le 30 août, un choc a eu lieu : l’écrasement d’un des F-16 et le décès du pilote lors d’une défense contre une vaste attaque de missiles russes sur le territoire ukrainien. Cette situation a eu lieu quelques jours après que l’Ukraine ait constamment plaidé pour avoir des F-16 fabriqués aux États-Unis, suivant l’invasion russe de février 2022. En août 2023, le président américain, Joe Biden, a en effet approuvé le déploiement des F-16 américains en Ukraine, sans pour autant fournir de leurs propres avions.

D’ici 2028, Kiev est censée recevoir 95 avions promis par différents alliés, dont trente en provenance de Belgique, vingt-quatre des Pays-Bas, vingt-deux de Norvège et dix-neuf du Danemark. En outre, la Suède s’est engagée fin mai à fournir un avion de type Awacs, un matériel indispensable pour l’acquisition de renseignements et la coordination des opérations avec les F-16.

Néanmoins, les pilotes ukrainiens doivent encore se familiariser avec ces avions de combat américains. À cet effet, onze pays alliés de Kiev se sont engagés à former ces pilotes. Reste à voir quel type de soutien militaire ces alliés offrent à Kiev.

Deux ans après le début de la guerre, le soutien de l’Occident à Kiev semble diminuer. D’après le dernier rapport de l’Institut Kiel, publié en février 2024, les aides récemment accordées ont décliné entre août 2023 et janvier 2024 comparativement à la même période de l’année précédente. Cette tendance semble aller à la continuation : le Sénat américain ayant du mal à approuver de nouvelles aides et l’Union européenne ayant eu du mal à obtenir l’adoption d’une aide de 50 milliards d’euros le 1er février 2024, principalement à cause de l’opposition hongroise. Il est à noter que ces deux paquets d’aides ne sont pas encore inclus dans le dernier bilan de l’Institut Kiel, qui se termine en janvier 2024.

Les chiffres de l’institut allemand indiquent qu’il y a une diminution et une concentration du nombre de donateurs autour d’un groupe de pays : les États-Unis, l’Allemagne, les pays du nord et de l’est de l’Europe, qui promettent à la fois une importante aide financière et des armements sophistiqués. Au total, depuis février 2022, les nations soutenant Kiev se sont engagées à offrir au moins 276 milliards d’euros en aides militaires, financières ou humanitaires.

Les nations les plus aisées ont été les plus généreuses. Les États-Unis sont les donateurs les plus importants, ayant annoncé plus de 75 milliards d’euros d’aide, dont 46,3 milliards en aide militaire. Les nations de l’Union européenne ont promis à la fois des aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et des aides communes provenant des fonds de l’Union européenne (93,25 milliards d’euros), pour un total de 158,1 milliards d’euros.

Au regard des contributions des pays donateurs en proportion de leur Produit Intérieur Brut (PIB), le classement se modifie. Les États-Unis glissent à la vingtième position (contribuant à 0,32 % de leur PIB), derrière certains pays limitrophes de l’Ukraine ou d’anciennes républiques soviétiques. L’Estonie monte en première position des aides en proportion de PIB, avec 3,55 %, suivie du Danemark (2,41 %) et de la Norvège (1,72 %). La Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %) viennent compléter le top cinq. Les trois pays baltes, ayant tous des frontières en commun avec la Russie ou son alliée, la Biélorussie, comptent parmi les plus généreux donateurs depuis le début de la crise.

Au regard des contributions en proportion du PIB, la France se retrouve à la vingt-septième place, ayant attribué 0,07 % de son PIB, juste derrière la Grèce (0,09 %). L’assistance fournie par la France a subi une diminution progressive depuis le commencement de l’invasion de l’Ukraine par la Russie – la France occupait la vingt-quatrième position en avril 2023, et la treizième à l’été 2022.

Qu’en est-il des tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne?

Les tensions entre l’Ukraine et la Pologne sont palpables depuis de nombreux mois, principalement en raison des problèmes liés au transit des céréales ukrainiennes. Au printemps 2022, l’Union Européenne avait instauré des « corridors de solidarité » pour promouvoir l’expédition et la commercialisation des produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient sans imposition de droits de douane. Toutefois, il est à noter que depuis l’escalade des tensions, environ la moitié des céréales produites en Ukraine ont été transportées ou terminées dans l’Union Européenne, selon les observations de la Fondation Farm, un forum de discussion sur les questions agricoles mondiales. Ces céréales sont introduites sur le marché à des prix nettement inférieurs à ceux du blé cultivé dans l’UE, en particulier dans les pays d’Europe centrale.

Soutenant que ces importations ont des répercussions négatives sur le marché local et, par conséquent, sur les revenus de leurs agriculteurs, plusieurs pays, dont la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie, ont décidé de bloquer leurs importations de céréales ukrainiennes en avril 2023. Cet embargo a été approuvé par Bruxelles, à condition qu’il ne perturbe pas le transit vers d’autres pays et ne dure que quatre mois.

Cependant, Varsovie a choisi de maintenir sa frontière fermée aux céréales ukrainiennes après l’été, malgré l’avis de Bruxelles qui soutenait que l’embargo n’était plus justifié, ses analyses indiquant qu’il n’y avait plus de distorsion des marchés nationaux pour les céréales. La question principale, semble-t-il, n’a pas été résolue.

Depuis un certain temps, les agriculteurs de Pologne ont mis en place un blocus à la frontière polono-ukrainienne dans le but d’empêcher les camions venant de l’Ukraine d’accéder à leur territoire national. Leur manifestation exige un « embargo total » sur tous les produits agricoles et alimentaires en provenance de l’Ukraine. Ils expriment leur mécontentement face à la forte augmentation de leurs frais de production tandis que leurs silos et entrepôts sont remplis à capacité et que le marché enregistre des prix au plus bas. Au début de l’année 2024, le président ukrainien a considéré ce blocage à la frontière comme une preuve de « la dégradation de la solidarité » envers son pays et a plaidé pour entamer des discussions avec la Pologne. Il a également mentionné que « seule Moscou se réjouit » de cette situation conflictuelle en soulignant « l’émergence de slogans explicitement pro-Poutine ».