La série « Marguerite Duras, l’éternelle mythologie » comprend tous les épisodes à cet endroit. À l’âge de 17 ans, Isabelle Adjani se souvient avoir été introduite à l’autrice Marguerite Duras, responsable du livre captivant « Détruire dit-elle » (publié par Editions de Minuit en 1969), dans sa résidence rue Saint-Benoît au début des années 70. L’impression de la jeune actrice était celle d’un plancher instable, à moins qu’elle ne soit elle-même en état de suspension. Adjani se remémore cette rencontre avec beaucoup d’émotion, exprimant comme elle se sentait sous le charme et privilégiée. « C’était quelque chose que Duras ressentait et je crois qu’elle aimait l’idée de me séduire », déclare-t-elle au journal Le Monde. « J’approchais de Duras, et elle se retirait. »
Âgée de 58 ans à l’époque, Duras témoigne un certain intérêt pour la jeune actrice avec ses yeux bleus et ses cheveux noirs, un trait qui figurera dans l’un de ses futurs romans (Editions de Minuit, 1985). Selon Adjani, le regard de Duras était particulièrement direct: « Elle regardait ma jeunesse, c’est ce que je pense. Je me sentais à l’abri », ajoute-t-elle, ravie de se remémorer cette rencontre.
Selon l’actrice, un de ses passages d’auteur préférés est tiré d' »Ecrire » de Duras. Avant d’être un livre paru chez Gallimard en 1993, ce texte était une interview filmée dans la maison de Neauphle-le-Château (Yvelines), un lieu dédié à la solitude et l’écriture. « L’écriture a été la seule constante dans ma vie, elle m’a toujours guidée », souligne-t-elle. Si elle n’avait pas écrit, elle aurait succombé à l’alcool, ajoute-t-elle.
Ernest Hemingway, avec son style dépouillé et minimaliste, est un autre auteur qu’elle aime. Elle cite ses « Green Hills of Africa » (Gallimard, 1937) comme une référence. Lors de la rédaction de son premier roman, « Les Impudents » (Gallimard, 1943), elle craignait la réaction de son amant, Dionys Mascolo : « As-tu encore lu Hemingway ? ». Elle admire Gustave Flaubert et Marcel Proust, mais son admiration la plus profonde est pour l’historien Jules Michelet, dont l’essai « La Sorcière » a suscité un scandale en 1862.
Le critique Ramon Fernandez perçoit immédiatement le potentiel de la jeune Duras. Dans la revue Panorama, distribuée en 1943 et 1944, l’écrivain collaborationniste écrit: « On sent qu’elle est séparée de ses personnages par un voile d’histoire, ce qui fait qu’ils sont encrés dans son subconscient lorsqu’elle les crée. Même si elle peut les façonner à sa guise, la possibilité qu’ils la surprennent reste toujours ouverte. ».
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