Pris dans le tourbillon d’une crise politique domestique et encore à la chasse pour un premier ministre, le chef d’État français, Emmanuel Macron, s’est déplacé à Belgrade le jeudi 29 août. Là-bas, un contrat pour l’acquisition de douze avions de combat Rafale par la Serbie a été annoncé lors d’une cérémonie en compagnie de son homologue serbe, Aleksandar Vucic.
Les chasseurs fabriqués en France sont destinés à s’occuper de l’ancienne flotte de Mig russes de l’armée aérienne serbe. D’ici 2029, Belgrade est censée obtenir neuf Rafale monoplaces et trois biplaces, pour un total de 2,7 milliards d’euros, comme l’a signalé le président Vucic. «C’est une grande nouvelle. Nous sommes ravis de faire partie du Club Rafale», a déclaré M. Vucic lors de la conférence de presse qui a suivi l’annonce de plusieurs accords entre les deux pays sur des sujets tels que l’intelligence artificielle, l’énergie nucléaire et l’agriculture. De son côté, M. Macron voit cet accord d’achat comme une « alliance à long terme entre nos deux pays ».
Néanmoins, l’achat des Rafale reste un sujet délicat. En dépit de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la Serbie, toujours candidate à l’adhésion à l’Union européenne, continue de maintenir des liens avec Moscou et n’a pas imposé de sanctions à la Russie depuis le début de la guerre en 2022. Interrogé par l’Agence France-Presse, le président Vucic a argumenté que presque tous les « avions intercepteurs » serbes et l’ensemble des « avions de combat viennent de Russie ». Il a ajouté : « Nous devons progresser, changer nos habitudes et tout le reste pour préparer notre armée », insistant sur le fait que « la Serbie pourrait devenir un membre du Club Rafale ».
L’argument qu’un « ancrage » de la Serbie dans l’Union européenne est souhaitable a également fait son chemin en France. Paris espère que Belgrade fera le « choix stratégique » de « collaborer avec une nation européenne » pour moderniser son parc aérien.
Si la France n’occupe pas le vide « par exemple avec des avions Rafale » laissé par les avions russes utilisés en Serbie, « cette poche au cœur de l’Union européenne pourrait se transformer en point d’entrée pour l’instabilité sur notre continent et pour tous les gouvernements autoritaires, de la Russie à la Chine », a soutenu Jean-Noël Barrot, ex-ministre chargé de l’Europe, sur Franceinfo jeudi matin. Il s’est également rendu en Serbie, tout comme Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation.
Emmanuel Macron soutient que la Serbie a « sa place » au sein de l’UE. La position officielle de la France est de soutenir l’adhésion de la Serbie à l’UE, une démarche approuvée par Aleksandar Vucic malgré les inquiétudes exprimées par le public. « Votre pays appartient à notre Europe et à notre Union européenne », a déclaré M. Macron jeudi soir, exprimant son souhait de « voir progresser les négociations d’adhésion ».
Dans une lettre publiée jeudi dans la presse serbe, M. Macron a affirmé que « l’Union européenne et ses Etats membres nécessitent une Serbie puissante et démocratique à leurs côtés et la Serbie exige une Union Européenne robuste et souveraine ». Huit mois après les élections législatives serbes, marquées par des fraudes selon l’OCDE et le Parlement européen et remportées par le parti présidentiel, l’Elysée est d’avis que cette adhésion doit inciter Belgrade à « renforcer l’État de droit ».
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