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27 août 2024 13 h 09 min

« Peter Stamm: Sur le Seuil Ailleurs »

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Voici une nouvelle version de l’original: « L’Heure bleue », une œuvre de Peter Stamm traduite de l’allemand (Suisse) par Pierre Deshusses, est disponible chez Christian Bourgois à 21 € pour la version papier et 16 € pour la version numérique. Il fait 230 pages. Les grands auteurs, peu importe leurs actions, sont toujours intrigants. Même leurs échecs peuvent nous éclairer sur les subtilités de la littérature, sur sa persistante nature subtile, même lorsque son enchantement commence à s’étioler. Toutefois, il serait extrême de considérer L’Heure bleue, réalisée par Peter Stamm, comme un échec. Le récit, qui raconte l’histoire hypnotisante d’un trio pris dans des amours passées, retrouvées et dévastées sous le regard d’une narratrice témoin, est plein de charme, de profondeur et de cette étincelle animée et inattendue que Stamm a su intégrer dans tout son travail. Néanmoins, après « L’un l’autre », « La Douce Indifférence du monde » et « Les Archives des sentiments »(éditions Christian Bourgois, respectivement en 2017, 2018 et 2023), la suite fascinante des pièces maîtresses que l’auteur Suisse nous a récemment proposées, il semble que la narration a connu un raté. Elle est comme suspendue au-dessus des mystères qui l’obsèdent, au lieu de s’y plonger profondément comme dans les œuvres précédentes, et de façonner un univers à partir des mêmes doutes et des mêmes fragments de réalité. »

La protagoniste dans l’histoire joue peut-être un rôle crucial. Richard Wechsler, connu pour sa discrétion, sa rudesse, sa mélancolie et son cynisme, incarne l’image archétypale de l’écrivain vieillissant dans la littérature moderne. Malgré le risque de stéréotypage, l’habileté tactique de Peter Stamm, sa légère ironie et son sens de la distance lui permettent de franchir cette ligne. Il joue avec les clichés sans les renverser. Il est important de souligner que son intention n’est pas de donner un portrait exact de Wechsler, le personnage étant plutôt défini par la façon dont il est perçu par Andrea, la narratrice.

Le vide et le silence

La narratrice, qui est réalisatrice ou aspire à l’être, envisage de réaliser un documentaire sur l’écrivain. Elle se rend à Paris, lieu de prédilection de l’écrivain suisse, pour tourner quelques séquences laborieuses où Wechsler déambule en livrant de vagues maximes et semi-aveux. Elle n’est guère étonnée lorsque l’écrivain manque à leur rendez-vous dans son village natal, où elle voulait le confronter à son passé. Il ne donne aucune explication ni nouvelles. Ainsi, elle peut se consacrer pleinement à ce qu’elle fait le mieux depuis le début du projet : imaginer la vie qui lui échappe.

Donc, elle décide de rester. Elle explore le village, retrouvant des environnements familiers à partir des livres de Wechsler. Elle fait la connaissance de personnes qui ont marqué son enfance et sa vie plus tard, notamment Judith, la pasteur locale, avec laquelle il avait été impliqué intimement et peut-être même davantage, comme elle commence doucement à le lui indiquer. Après le retour d’Andrea chez elle, elle finit par découvrir la mort de l’écrivain. Judith la visite de temps à autre et commence à raconter l’histoire, partiellement. Andrea comble les manques. Elle rêve que Richard et Judith soient à ses côtés pour l’éternité. Elle déclare: « Je m’allonge, ferme les yeux et chuchote: approchez, entrez! C’est comme séance de spiritisme. » Mais rien ne se produit, ni pour elle ni pour le roman qui se fige dans cette attente.
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