Deux semaines après le viol et le meurtre d’une praticienne dans un hôpital public de Calcutta, l’agitation persiste en Inde. Calcutta, la capitale du Bengale-Occidental, est chaque jour le lieu de protestations non seulement de médecins mais aussi de personnes de toutes sortes, venues exprimer leur indignation suite à ce crime atroce. Le cadavre de la résidente de 31 ans, connue sous le pseudonyme de « l’Abhaya » (l’intrépide) pour préserver son anonymat comme la loi l’exige, a été découvert sévèrement mutilé le 9 août dans une salle de conférences où elle était allée se reposer après un service de 36 heures, n’ayant pas d’installation adéquate pour se reposer. Le suspect serait un bénévole de la police locale en charge d’orienter les patients, mais l’enquête continue pour déterminer les responsabilités institutionnelles.
La Cour Suprême, qui a un rôle crucial dans la résolution de l’affaire et pour pousser les autorités à garantir la sécurité dans les hôpitaux, a entendu, le jeudi 22 août, le représentant du Bureau Central d’Investigation (CBI), qui est en charge de l’enquête suite à l’incompétence présumée de la police de Calcutta. Son témoignage, révélateur, met en évidence plusieurs anomalies, incohérences et manquements de la part de la direction de l’hôpital et de la police, dans une tentative de dissimulation du viol et du meurtre et de le travestir en suicide. « Notre investigation est un défi en elle-même, car la scène du crime a été modifiée », a déclaré l’avocat du CBI.
La Cour Suprême a mis en lumière l’énorme décalage entre la découverte d’un cadavre et le moment où la plainte a été déposée à la police, un écart de quatorze heures. Le corps avait été incinéré immédiatement après l’autopsie. Le président de la Cour suprême, Dhananjaya Yeshwant Chandrachud, a posé la question : « Que s’est-il passé durant tout ce délai? »
Le directeur, qui a été renvoyé peu de temps après le meurtre, subit encore les interrogations des inspecteurs. Bien que le CBI ait reçu l’approbation judiciaire jeudi pour soumettre le directeur, ainsi que quatre autres médecins, à un détecteur de mensonges, il persiste une grande méfiance.
La Cour suprême a également relevé des dysfonctionnements de la part de la dirigeante du gouvernement du Bengale-Occidental, Mamata Banerjee, responsable de la police. Elle fait face à des critiques généralisées pour sa gestion du cas et pour l’état de l’hôpital.
Quant à l’état des infrastructures, c’est déplorable. Shouradipta Chandra, médecin à New Delhi qui a travaillé pendant seize ans à Calcutta, a témoigné de sa terrible expérience dans les hôpitaux publics du pays. Il évoque manque de sécurité, des conditions de travail inhumaines et pas de lieux de repos pour les médecins travaillant soixante-douze heures d’affilée. Il dénonce également un système corrompu du bas vers le haut. Malheureusement, cette situation n’a pas changé au fil des ans, malgré leurs réclamations répétées.