Le commerce entre l’Europe et la Chine est loin d’être détendu. Suite à une hausse des tarifs douaniers sur les voitures électriques chinoises le 5 juillet, Bruxelles a pris la décision le 14 août de taxer les importations de biodiesel venant de Chine. Les efforts européens pour lutter contre le dumping impactent principalement les industries subventionnées par le gouvernement chinois, mais d’autres lois et réglementations, existantes ou à venir, pourraient menacer les mastodontes du e-commerce chinois, notamment Shein, la célèbre plateforme de vente de vêtements à petits prix.
Shein est souvent considérée comme un exemple de réussite, ayant su tirer parti de la mondialisation pour construire un empire sans frontières grâce à l’innovation technologique. Cependant, il semblerait que Shein soit plus étroitement liée à la stratégie mise en œuvre par Pékin pour avancer ses pions sur l’échiquier du marché mondial, aux dépens de ses concurrents occidentaux, en exploitant les failles de la mondialisation.
Résultats absurdes
La première faille provient de l’Union postale universelle (UPU). Fondée en 1874, l’UPU offre des remises, depuis 1971, aux expéditeurs des pays « en développement »… comme la Chine, ce qui donne lieu à des absurdités : l’envoi d’un colis de moins de 2 kilos par avion de la Chine à la France coûte moins cher que l’envoi d’un paquet similaire entre Lyon et Nice. Si Washington a réussi, en 2019, en menaçant de quitter l’UPU, à obtenir le droit de fixer librement ses tarifs, aucun des vingt-sept membres de l’Union européenne (UE) n’a osé emprunter cette voie.
Le code douanier européen offre une faille seconde en exemptant de droits de douane depuis 2010 les colis extra-européens contenant des produits d’une valeur modeste, inférieure à 150 euros. Les plateformes chinoises comme Shein, Temu, et AliExpress ont, grâce au Covid-19, vu leur commerce s’intensifier. Cette réglementation a permis à Shein de réaliser un profit de 2 milliards de dollars (approximativement 1,812 milliard d’euros) en 2023, année où plus de deux milliards de petits colis de faible valeur ont été introduits dans l’UE. Par conséquent, Shein a supplanté H&M et Zara, dominant le marché de « l’ultrafast fashion ». Cependant, la Commission européenne a calculé que cette pratique avait entraîné une perte de 1,5 milliard d’euros aux douanes de l’Union. Le 5 juillet, le Parlement européen a donc suggéré d’éliminer cette exemption.
Néanmoins, le succès de Shein repose principalement sur le bas coût de production des textiles chinois. Malgré leurs approvisionnements auprès de milliers d’entreprises en Chine, le leadership du groupe reste discret sur ses relations avec le gouvernement. En 2021, l’ONG suisse Public Eye a mis en lumière les conditions de travail déplorables des employés dédiés à la plateforme. Par ailleurs, une enquête de Bloomberg en 2022 a révélé l’utilisation de coton provenant du Xinjiang, région accusée d’instaurer le travail forcé des musulmans Ouïgours.
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