Dans une décision historique, la juridiction pénale et civile suprême d’Allemagne, le Tribunal fédéral de Leipzig, a indiqué qu’une ancienne secrétaire d’un camp de concentration pouvait être accusée de complicité involontaire dans un meurtre de masse. Cela faisait suite à une réaffirmation de la condamnation de 2022 de la cour régionale d’Itzehoe en Schleswig-Holstein contre Irmgard Furchner, accusée de collaborer à l’assassinat de 10 500 prisonniers du camp de concentration de Stutthof situé près de Danzig, en Pologne. Âgée de 99 ans, Mme Furchner, qui travaillait comme sténographe pour le camp, a toujours nié toute implication dans les crimes de Stutthof et avait fait appel de sa condamnation. Le verdict de deux ans avec sursis prononcé en 2022 a été confirmé par le juge fédéral, mardi.
Cet événement, qui a suscité un intérêt et des commentaires importants en Allemagne, pourrait être le dernier jugement d’un cas impliquant des meurtres en masse pendant l’ère nazie. Le procès pose la question de la condition légitime et éthique de condamner, quatre-vingts ans après les faits, ceux qui étaient en bas de l’échelle du régime pour leur implication dans les crimes nazis, pendant que plusieurs de leurs principaux auteurs réussissaient à échapper à la justice.
Mme Furchner, à l’âge de 18 ans, a été employée en tant que secrétaire auprès du directeur du camp de concentration Stutthof, sous la gouvernance de Paul Werner Hoppe, de juin 1943 jusqu’à avril 1945. Les juges fédéraux ont conclu que, bien qu’elle ait un rôle subordonné, elle pouvait être reconnue comme corresponsable des meurtres en masse perpétrés contre les détenus du camp. Selon la cour, même les employés occupant des postes modestes pourraient être légalement impliqués comme complices des crimes commis là-bas. C’était le sujet principal lors du procès en appel qui marque la fin de plusieurs années de procédure juridique.
Le président du conseil central des Juifs en Allemagne, Josef Schuster, a soutenu ce verdict, bien qu’il ait regretté que l’accusée n’ait pas admis sa culpabilité. Schuster a déclaré : « Le but n’est pas de l’emprisonner pour le reste de sa vie. L’important est qu’une personne coupable réponde de ses actes et trouve les mots pour décrire ce qui s’est passé et son implication dans ces événements. En tant que secrétaire, elle a été consciemment complice du meurtre systématique instauré par les Nazis. » Un survivant de Stutthof, Abraham Koryski, 96 ans, résidant en Israël, a confirmé ce point de vue lors d’un des derniers témoignages en juillet. Selon sa déclaration lue par son avocate, « Ceux qui travaillaient dans l’administration du camp, en particulier, ne peuvent prétendre qu’ils ignoraient ce qui se passait. Ils avaient une connaissance préalable des personnes qui seraient exécutées ou déportées. »
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