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21 août 2024 10 h 09 min

« Dipneuste sud-américain: fossile vivant, génome XXL »

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Le génome du dipneuste sud-américain est trente fois plus grand que celui de l’homme, selon une recherche publiée le 14 août dans la revue scientifique Nature par une équipe internationale de scientifiques. Les dipneustes sont des poissons dont les traits ressemblent beaucoup à ceux des tétrapodes, nos ancêtres à quatre membres, dont font partie les humains, les amphibiens, les reptiles, les oiseaux et autres mammifères. Ces scientifiques étudient les dipneustes dans le but de cerner le processus de transition de la vie aquatique à la vie terrestre, qui s’est produite il y a environ 400 millions d’années.

En 2021, ce même groupe de chercheurs avait séquencé le génome du dipneuste australien, qui est quinze fois plus grand que celui de l’homme. Ils ont ensuite analysé les génomes des dipneustes sud-américain et africain, et ont découvert que le génome du dipneuste sud-américain est actuellement le plus grand génome animal connu. Il compte 91 milliards de paires de bases, ce qui signifie que dix-huit de ses dix-neuf chromosomes pourraient chacun contenir un génome humain en entier, une réalité qui fascine toujours Axel Meyer, professeur d’évolution biologique à l’Université de Constance en Allemagne et dernier auteur de l’étude. Hugues Roest Crollius, directeur du laboratoire Dyogen spécialisé en génomique évolutive à l’Ecole normale supérieure de Paris, qui n’a pas collaboré à l’étude, qualifie cette réalisation de tour de force technique.

Dans le génome des dipneustes, il existe des séquences d’ADN mobiles et répétées, appelées transposons, qui se multiplient indépendamment. Ces fragments d’ADN se déplacent d’une section de chromosome à une autre, explique Domitille Chalopin, co-auteur et chercheur spécialisée dans les éléments transposables à l’université de Bordeaux. Ceci est comparable à des phrases copiées et collées de manière infinie dans le livre du génome, sans cohérence avec les phrases environnantes – une situation analogue à un écrivain qui perd le contrôle de la fonction copier-coller sur son clavier.

Axel Meyer s’interroge à propos de l’absence d’action de l’évolution contre ces grands génomes. La réponse n’est pas totalement évidente. La fabrication de 91 milliards de paires de bases par chaque cellule implique que le noyau et la cellule soient très volumineux, ce qui nécessite une grande quantité d’énergie pour l’animal.

Normalement, il existe des mécanismes régulateurs qui empêchent ces transposons de se propager de manière incontrôlée. En effet, les petits ARN et les protéines spécialisées limitent leurs mouvements. Cependant, les chercheurs ont remarqué que ces éléments régulateurs sont moins présents chez le dipneuste sud-américain, ce qui pourrait causer la taille exceptionnelle de son génome, qui est composé à 90 % de ces séquences répétées. Les chercheurs ont prouvé que ces éléments transposables sont constamment actifs. « Ils sont toujours capables de se multiplier, d’où l’expansion rapide du génome », ajoute Domitille Chalopin. Pour lire la suite de l’article, vous devez être abonné.