Parcourez l’ensemble de nos écrits, commentaires et reportages relatifs au conflit ukrainien. Volodymyr Zelensky, dans une de ses déclarations, a admis le « changement de décor de la guerre vers le camp de l’agresseur », suite à l’intrusion des forces ukrainiennes en territoire russe. Le ministre ukrainien, Mykhaïlo Fedorov, s’est exprimé sur la nature asymétrique du conflit, qui implique l’usage de technologies inattendues par l’ennemi.
Du côté de Kiev, une offensive en territoire russe représente des enjeux considérables. Dans le contexte des JO 2024, la guerre reste un fantôme ombrageux derrière les performances des athlètes ukrainiens. Tandis qu’en Ukraine, les conséquences d’un conflit de longue durée restent floues.
Nous mettons à votre disponibilité les réponses à vos questions les plus courantes. Par exemple, comment les drones sont-ils utilisés par Moscou et Kiev ?
La guerre des drones entre la Russie et l’Ukraine a pris une nouvelle dimension ces derniers mois. Un rapport a révélé que les Ukrainiens perdent environ 10 000 drones chaque mois sur le champ de bataille, soit plus de 300 drones par jour. Ceci ramené à l’échelle, dépasse largement le nombre de drones détenus par l’armée française qui s’élève à un peu plus de 3 000.
Ces drones civils bon marché, utilisés de chaque côté, sont nommés UAV (unmanned aerial vehicle, en anglais). Ils ont principalement pour fonction de surveiller le champ de bataille et de guider les forces ou les tirs d’artillerie. Certains peuvent être modifiés pour transporter de petites charges explosives, qui sont par la suite larguées sur des tranchées ou des véhicules blindés.
Les drones-kamikazes, bien qu’ils soient moins nombreux, jouent une part cruciale. Ces UAV qui portent une charge explosive sont déployés au-delà des lignes de front sans objectif prédéterminé. La Russie déploie des drones russe Lancet-3 ainsi que des Shahed-136 iraniens. Faute d’une véritable marine de guerre, l’Ukraine utilise des véhicules nautiques sans pilote, notamment des kayaks miniatures télécommandés et munis d’explosifs (450 kilos de TNT).
Tant les Ukrainiens que les Russes reconnaissent l’importance des drones et ont pris des mesures pour soutenir leurs troupes à long terme. Ils n’achètent pas uniquement des drones civils en grand volume du marché, mais investissent également dans leur propre capacité de production. Alors qu’au début du conflit dans le Donbass, l’industrie nationale ukrainienne était encore balbutiante, elle a depuis connu une nette progression. Le ministre ukrainien de la transformation numérique a annoncé fin août qu’une réplique du drone russe Lancet serait bientôt laissée sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.
En raison de sanctions de l’ouest qui entravent sa capacité d’approvisionnement en composants électroniques, la Russie rencontre davantage de difficultés. Cependant, selon les services de renseignement américains, ils auraient commencé à construire une usine dans la zone économique spéciale d’Alabouga dans le but de produire des drones-kamikazes iraniens, tels que les Shahed-136.
Quant aux stocks de missiles russes, les renseignements sont rares et souvent peu fiables. Les services de renseignement ukrainiens proposent régulièrement des mises à jour à ce sujet, cependant, leur fiabilité reste incertaine.
D’après Andri Ioussov, le porte-parole du service de renseignement du ministère de la Défense (GUR), l’armée russe avait environ 2 300 missiles balistiques et de croisière avant le déclenchement du conflit. Ce nombre a chuté à plus de 900 au début de l’année, comme rapporté par Liga.net. À ces chiffres, Ioussov ajoute une dizaine de milliers de missiles antiaériens S-300, d’une portée d’environ 120 kilomètres, ainsi qu’un stock considérable de S-400, une version plus récente avec une portée triplée. Vadym Skibitsky, le deuxième en charge du GUR, estimait en août le nombre de missiles ayant une portée de plus de 500 kilomètres à 585.
En matière de production, le pays serait en mesure de fabriquer une centaine de missiles balistiques ou de croisière par mois, selon plusieurs spécialistes. En octobre, le GUR estimait cette production à 115 unités.
La Russie aurait également acquis des missiles à courte portée en Iran et en Corée du Nord et continuerait de le faire. L’agence Reuters, se basant sur plusieurs sources iraniennes, rapporte que 400 missiles iraniens de la gamme Fateh-110 (d’une portée de 300 à 700 kilomètres) auraient été livrés depuis janvier, date à laquelle un accord aurait été signé. Le nombre de missiles nord-coréens acquis par la Russie reste inconnu, cependant, 24 ont été tirés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, selon le procureur général, Andriy Kostin. Les experts ayant analysé les éclats et les trajectoires pensent qu’il s’agirait probablement des modèles KN-23 et KN-24 d’une portée d’environ 400 kilomètres.
Et qu’en est-il des avions de combat F-16 ?
En août 2023, les États-Unis ont répondu à une demande à long terme du président ukrainien en approuvant le transfert de F-16 à l’Ukraine. Il existe plus de 300 de ces avions de combat potentiellement disponibles dans neuf pays européens, y compris la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal, mais tous ne peuvent pas les céder immédiatement.
Volodymyr Zelensky a fait état de 42 F-16 que les alliés occidentaux avaient promis à Kiev, bien que ce nombre n’ait pas été vérifié. Le Danemark a promis 19 de ces avions, avec les 6 premiers devant être livrés à la fin de 2023, 8 de plus en 2024 et 5 autres en 2025, comme l’a annoncé la première ministre danoise, Mette Frederiksen. Les Pays-Bas ont également promis de fournir des F-16, bien qu’ils aient 42 unités en stock, ils n’ont pas indiqué combien ils prévoyaient de remettre.
En outre, il sera nécessaire de former les pilotes ukrainiens à l’utilisation de ces avions de combat américains. Onze pays alliés de Kiev se sont engagés à prendre en charge cette formation. Selon l’OTAN, les forces ukrainiennes ne seront pas prêtes à utiliser ces avions en combat avant le début de 2024, tandis que d’autres experts prévoient qu’ils pourraient être prêts d’ici l’été de cette même année.
Quel est l’apport militaire des alliés de Kiev?
Deux années se sont écoulées depuis le début d’un conflit majeur et on observe une dépréciation de l’appui de l’Occident à Kiev. D’août 2023 à janvier 2024, il y a une réduction des nouvelles aides par rapport à la même durée de l’année précédente, selon le dernier rapport de l’institut Kiel paru en février 2024. La tendance pourrait se maintenir, dû à l’incapacité du Sénat américain à approuver des soutiens financiers et de l’Union européenne (UE) qui a rencontré des obstacles pour faire accepter une aide de 50 milliards le 1er février 2024, en raison de l’opposition de la Hongrie. À noter que ces deux packets d’aide ne figurent pas dans le dernier bilan de l’Institut Kiel qui s’achève en janvier 2024.
Les statistiques de l’Institut allemand révèlent que le cercle des donateurs diminue et se concentre autour de certains pays : les États-Unis, l’Allemagne, et les nations du nord et de l’est de l’Europe qui proposent à la fois un soutien financier considérable et de l’équipement militaire avancé. Depuis février 2022, les pays qui défendent Kiev se sont engagés à fournir un montant d’au moins 276 milliards d’euros en aide militaire, financière ou humanitaire.
En termes absolus, les nations les plus prospères ont été les plus libérales. Les États-Unis sont largement en tête des donateurs avec plus de 75 milliards d’euros d’aide promis, dont 46,3 milliards en soutien militaire. Les pays de l’Union européenne ont annoncé à la fois des aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et des aides conjointes des fonds de l’Union européenne (93,25 milliards d’euros), soit un total de 158,1 milliards d’euros.
En prenant en compte les contributions en pourcentage du produit intérieur brut (PIB) de chaque pays donateur, la liste des pays change. Dans ce nouveau classement, les États-Unis se retrouvent en vingtième position avec seulement 0,32% de leur PIB, bien loin derrière des nations voisines d’Ukraine ou des anciennes républiques soviétiques alliées. L’Estonie est le pays qui contribue le plus, avec 3,55% de son PIB, suivie du Danemark (2,41%) et de la Norvège (1,72%). Les deux autres pays qui complètent le top cinq sont la Lituanie (1,54%) et la Lettonie (1,15%). Les trois états baltes, qui partagent tous des frontières avec la Russie ou son alliée, la Biélorussie, sont parmi les donateurs les plus généreux depuis le début du conflit.
En ce qui concerne le pourcentage du PIB, la France est classée vingt-septième, ayant consacré seulement 0,07% de son PIB, tout juste après la Grèce (0,09%). L’assistance fournie par la France a vu une diminution continue depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie – la France était vingt-quatrième en avril 2023, et treizième en été 2022.
Qu’avons-nous appris des tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne?
Pendant de nombreux mois, la Pologne et l’Ukraine ont été en conflit en raison du transit des grains ukrainiens, qui constituent la principale source de tension. Au printemps 2022, la Commission européenne a mis en œuvre des « corridors de solidarité » pour faciliter l’exportation et la commercialisation des produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient, sans avoir à payer de droits de douane. Néanmoins, selon la Fondation Farm, un groupe de réflexion sur les questions agricoles mondiales, environ la moitié des céréales ukrainiennes passent ou terminent leur voyage au sein de l’Union européenne depuis le début du conflit. Ces grains sont vendus à un prix inférieur à celui du blé produit dans l’UE, en particulier dans les pays d’Europe centrale.
La Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie, et la Slovaquie avaient donc choisi de bloquer leurs importations du grain ukrainien en avril 2023, arguant que cela perturbait leur marché local et affectait les revenus de leurs fermiers. Bien que Bruxelles ait consenti à cet embargo, elle a stipulé qu’il ne devait pas entraver le transit vers d’autres pays et devait se terminer après une période de quatre mois.
Cependant, Varsovie a jugé que la question sous-jacente n’était pas résolue et a choisi de ne pas rouvrir sa frontière aux céréales ukrainiennes à la fin de l’été. Contrairement à Bruxelles qui pensait que l’embargo n’avait plus lieu d’être car ses analyses indiquaient que « il n’y avait plus de distorsion des marchés nationaux pour les céréales ».
Les fermiers polonais ont instauré un blocus à la frontière polono-ukrainienne pour prévenir l’entrée des camions en provenance d’Ukraine sur leur territoire national. Ces manifestants exigent un « embargo total » sur les biens agricoles et alimentaires en provenance de l’Ukraine. Ils protestent contre l’augmentation subite de leurs coûts de production alors que leurs silos et magasins sont surpeuplés et les prix au plus bas. Le président ukrainien a déclaré au début de 2024 que le blocus à la frontière polonaise est le reflet de « l’affaiblissement de la solidarité» vue envers son pays et a demandé des discussions avec la Pologne. « Seule Moscou profite » de ces tensions, a-t-il affirmé, soulignant « l’émergence de slogans clairement pro-Poutine ».