Deux semaines après avoir quitté le Bangladesh en hélicoptère pendant que des manifestants envahissants les rues de Dacca réclamant son exil, Sheikh Hasina est maintenant sous le feu de trois enquêtes pour «réprimer les massacres». Un tribunal spécifique, qu’elle avait créé en 2010 pendant son mandat de première ministre, a révélé l’ouverture de ces enquêtes le lundi 19 août.
«Nous sommes en train de collecter des preuves préliminaires à l’heure actuelle,» a déclaré Ataur Rahman, le directeur adjoint de la cellule d’enquête du tribunal. Il a précisé que les trois cas en question étaient liés à des massacres. Selon l’Agence France-Presse (AFP), plus de 450 personnes, dont 42 officiers de police, ont été tuées lors des manifestations qui ont eu lieu en juillet et août.
M. Rahman a ajouté auprès de l’AFP, «Nous allons ensuite nous rendre sur les scènes de crime». Selon ce haut responsable du Tribunal international des crimes du Bangladesh (TIC), chacun des trois cas, qui sont associés à des violences survenues dans des banlieues ou des districts voisins de Dacca, impliquent des individus, dont plusieurs des principaux conseillers de Sheikh Hasina.
Le TIC, que Sheikh Hasina avait établi il y a 14 ans pour examiner les atrocités commises pendant la guerre d’indépendance avec le Pakistan en 1971, est un tribunal très controversé. Souvent critiqué par les organisations de défense des droits de l’homme, il a prononcé la peine de mort contre plus d’une centaine de personnes sous les gouvernements de l’ex-première ministre, y compris plusieurs de ses adversaires.
En 2013, le pays avait été bouleversé par les procès orchestrés par le tribunal, entraînant des violences létales et faisant diverger les opinions. Le parti principal de l’opposition, le Bangladesh Nationalist Party, et les adhérents du Jamaat-e-Islami voyaient ces jugements comme une stratégie pour anéantir leurs dirigeants. Les exécutions des condamnés avaient eu lieu peu après que leurs derniers recours furent refusés par la cour suprême.
La justice bangladaise n’est cependant pas la seule à être inquiète des récents troubles ayant visé la leader Sheikh Hasina, étalant de juillet à août. L’Organisation des Nations Unies (ONU) exprimait vendredi de vastes soupçons concernant l’emploi « injuste et excessif » de la force par les forces de sécurité bangladaises lors des manifestations ayant mené à la perte du pouvoir de la première ministre.
Un rapport initial du Haut-Commissariat des droits de l’homme de l’ONU a mentionné « des meurtres extrajudiciaires, des détentions et arrestations arbitraires, des disparitions forcées, des actes de torture et de mauvais traitements, ainsi que des limitations sévères à l’expression des libertés d’expression et de réunion pacifique ».
L’administration provisoire, menée par l’ économiste et lauréat du prix Nobel de la paix Muhammad Yunus, a annoncé jeudi dernier qu’il procurerait « tout le soutien possible » à une mission de l’ONU qui devrait arriver cette semaine au Bangladesh pour enquêter sur les « atrocités » commises lors des protestations d’étudiants. Sheikh Hasina avait demandé elle-même une enquête sur cette mobilisation qui l’a écartée du pouvoir quelques jours auparavant.
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