Après des années de discussion, l’Ukraine est sur le point d’être proclamée 125e membre de la Cour pénale internationale (CPI). Le président Volodymyr Zelensky a soumis un projet de loi de ratification du traité de Rome, qui a institué cette juridiction en 1998, à la Rada, le parlement ukrainien, le 15 août. La CPI poursuit les auteurs de génocide, de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et d’agression.
L’armée ukrainienne s’est jusqu’à maintenant opposée à la ratification du traité de cette cour, qui a été créée en 2002 à La Haye, aux Pays-Bas, de peur d’être elle-même l’objet d’accusations dans le contexte de la guerre déclenchée par la Russie en 2014. Par ailleurs, l’Union européenne, dont tous les membres ont ratifié le traité signé à Rome en juillet 1998, a fait pression pour que l’Ukraine adhère. Dmytro Kuleba, le ministre des affaires étrangères, a affirmé en 2023 que toutes les spéculations concernant les effets négatifs potentiels de l’adhésion étaient sans fondement.
Iryna Mudra, la chef adjointe du cabinet du président ukrainien, a écrit dans un éditorial publié sur le site European Pravda que la ratification du traité de Rome serait un indicateur puissant de l’engagement de l’Ukraine envers l’intégration européenne. Selon elle, l’adhésion à la CPI permettrait à l’Ukraine de punir les criminels russes, de renforcer sa position diplomatique et d’accroître l’isolement international de la Russie.
« Immunité pour sept ans »
Confronté à des pressions de toutes parts, notamment de la part du commissaire européen à la justice, Didier Reynders, et du procureur de la CPI, Karim Khan, le gouvernement ukrainien a finalement levé les obstacles en invoquant l’article 124 du traité de Rome. Ce traité sert presque de code pénal pour la Cour et l’article en question exempte tout Ukraine, civil ou militaire, de poursuites pour crimes de guerre par la CPI pendant sept ans.
La France, craignant des poursuites pour ses opérations de maintien de la paix à l’étranger, avait inséré cet article lors des négociations précédant l’adoption du traité de Rome en juillet 1998. Jusqu’à présent, seuls Paris et la Colombie ont fait appel à cet article, l’Ukraine devrait donc suivre leur exemple.
L’article 124 couvre également les auteurs de crimes de guerre commis sur le sol ukrainien, indépendamment de leur nationalité, et s’appliquera ainsi aux soldats russes. Cependant, son impact sera limité, sinon inexistant. L’Ukraine conserve le droit de poursuivre les auteurs russes de crimes de guerre devant ses propres tribunaux. De plus, l’article 124 ne s’appliquera que lorsque l’Ukraine deviendra officiellement membre de la CPI, c’est-à-dire trois mois après la soumission du texte ratifié, une fois approuvé par le Parlement, aux Nations Unies à New York. Il n’a donc aucun effet sur les six mandats d’arrêt déjà émis par la CPI contre des dirigeants politiques et militaires russes, dont Vladimir Poutine. Depuis mars 2023, le président russe est accusé de crimes de guerre pour la déportation d’enfants ukrainiens vers la Russie et le transfert forcé d’enfants dans la zone occupée du Donbass. Parmi les accusés figure également l’ancien ministre de la Défense Sergueï Choïgou.
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