Georges Corm, un auteur renommé et ancien ministre des finances du Liban, est décédé à l’âge de 84 ans à Beyrouth le 14 août 2024. Héritier des valeurs du cosmopolitisme levantin et du nationalisme arabe, il était un défenseur infatigable de la laïcité et était respecté pour son intégrité et son engagement envers la justice sociale. Karim Emile Bitar, analyste politique, a rendu hommage à sa mémoire.
Corm est né en 1940 dans une famille syro-libanaise d’Egypte à Alexandrie. Chrétien maronite, il avait 8 ans lors de l’événement connu sous le nom de Nakba (« catastrophe » en arabe) en 1948, qui a entraîné le déplacement forcé de 700 000 Palestiniens suite à la création de l’État d’Israël. Cet incident a eu un impact significatif sur lui et la région. En 1956, il a également été fortement affecté par l’intervention coordonnée en Égypte par la France, le Royaume-Uni et Israël suite à la nationalisation de la Compagnie universelle du canal de Suez.
Corm, qui avait reçu une éducation des pères jésuites du Caire et était imprégné de la culture française et de la philosophie des Lumières, a été profondément révolté par ces événements. D’après Bitar, l’expédition de Suez a influencé la façon dont il a compris les rivalités de puissance et les ingérences occidentales au Moyen-Orient. Il a été attiré par le discours anti-impérialiste du président égyptien Gamal Abdel Nasser.
Georges Corm, après avoir étudié à l’Institut d’études politiques de Paris et obtenu un diplôme en finances publiques en 1961, retourne au Liban pour rejoindre le ministère du plan en tant qu’économiste, avant de devenir expert au ministère des finances. Il acquiert également un doctorat en droit constitutionnel de l’Université de Paris. La direction du général Fouad Chehab a une grande influence sur Corm, qui embrasse le « chehabisme », un effort visant à bâtir un État libanais fort et renouvelé par la réforme et le développement.
Dans les années suivantes, son admiration sera étendue au président Houari Boumediene, et il considérera l’Algérie comme sa « deuxième patrie ». Il s’implique ensuite dans le secteur bancaire avant de devenir consultant pour des organisations internationales. Pendant la guerre civile libanaise (1975-1990), il s’établit à Paris et devient une référence pour de jeunes Libanais émigrés, se transformant en une sorte de guide spirituel pour une génération confuse, comme le rappelle l’économiste et ancien ministre du travail libanais Charbel Nahas.
Il exprime son désaccord avec les politiques financières instaurées après la guerre par le Premier ministre Rafic Hariri pour la reconstruction du Liban, affirmant qu’elles ont conduit à son effondrement. Lorsqu’il a l’opportunité de servir sous le gouvernement de Sélim Hoss (1998-2000) en tant que ministre des Finances, il préconise une approche progressive et réformiste, avec un risque modéré. Malheureusement, lors du retour de M. Hariri, il est écarté de la scène politique libanaise, une situation que M. Nahas déplore en déclarant que les pertes se sont décuplées au cours des vingt années suivantes.
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