Alain Le Chartier de Sédouy, aussi connu sous le nom d’Alain de Sédouy, est décédé ce jeudi 15 août. Né le 15 novembre 1929 à Paris, de Sédouy a joué un rôle crucial comme témoin et acteur de la deuxième moitié du XXe siècle. Au fil de sa carrière en tant que journaliste, réalisateur, scénariste, éditeur et producteur de télévision, il a été témoin des tumultueux changements qui balayaient la société après la Seconde Guerre mondiale, du temps de l’Occupation au mouvement de Mai 68, de la décolonisation à la chute du Rideau de fer, de l’ORTF à Canal+.
Son premier emploi fut celui de grand reporter pour le quotidien Paris-Presse. Il a couvert l’insurrection de Budapest en 1956 où il a failli être exécuté par les Soviétiques, selon son fils Sébastien, et la guerre d’Algérie de 1958 à 1961. Ces expériences ont confirmé son intérêt pour la narration des rêves brisés et l’importance de donner une voix aux rebelles et anonymes affectés par l’histoire. En 1961, bien qu’ami d’Aragon, il a témoigné en défense d’Hélie Denoix de Saint Marc, écrivain et officier de l’armée française impliqué dans le putsch des généraux à Alger. Cette action, comme l’a noté Sébastien Le Chartier de Sédouy, démontre bien l’esprit ouvert de son père.
Une des réalisations majeures d’Alain de Sédouy est le film documentaire « Le Chagrin et la Pitié » (1969) de Marcel Ophuls, une étude de ville sous l’Occupation. Ce film fut interdit à la télévision pendant douze ans. De Sédouy y a travaillé en tant que coscénariste avec André Harris, qu’il a rencontré à l’ORTF en 1963. Tous deux furent renvoyés de l’ORTF en mai 1968 suite à une accusation d’ « attitude antirépublicaine », car ils ont été les premiers à donner la parole à Daniel Cohn-Bendit et aux leaders du mouvement étudiant dans leur magazine d’actualité « Zoom ». Cela a provoqué un tollé et a déclenché une grève sans fin à l’ORTF, la plus longue de l’histoire de la télévision.
Devenus une référence dans la création d’émissions et de documentaires dérangeants et avant-gardistes, « Harris et Sédouy » suscitent l’intérêt à la fois pour leur choix de sujets controversés et pour leur ton unique. En 1966, ils ont produit le documentaire « Les Algériens de Paris », qui décrit la vie quotidienne de jeunes hommes et femmes qui ont quitté l’Algérie pour la France quatre ans après l’indépendance et qui vivent dans des taudis, confrontés à un racisme endémique.
Le duo au discernement impitoyable ne laisse rien passer inaperçu. En 1973, pendant le mandat de Georges Pompidou, ils ont co-dirigé « Français si vous saviez », un film que Le Monde a décrit comme « pirandellien ». Le film porte un regard critique sur la légende du général de Gaulle, illustrée à travers trois crises majeures qui l’ont marqué dans l’histoire : la débâcle de 1940, la renaissance de 1944 et l’avènement de la Ve République en 1958. Deux décennies plus tard, Alain de Sédouy estime qu’il est temps d’honorer d’autres figures algériennes oubliées de l’époque gaulliste grâce au film « L’Histoire oubliée : les harkis », co-dirigé avec l’historien Eric Deroo.
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