A Dacca, deux étudiantes sont désormais assignées à la surveillance du 32 Dhanmondi. Elles contrôlent les entrées et sorties afin de préserver ce qu’il reste de la demeure historique de Sheikh Mujibur Rahman, héros de la guerre d’indépendance contre le Pakistan en 1971 et père de l’ex-première ministre Sheikh Hasina. Lors de l’échappée de la « Dame de Fer », le lundi 5 août, les protestataires ont ciblé les symboles de son autorité.
Après quinze ans de « règne » de plus en plus despotique, marqué par la violente répression d’une mobilisation d’étudiants en juillet causant plus de 400 morts, les Rassemblements populaires aspiraient à se venger. Ils n’ont pas ménagé le patrimoine de « Mujib », le nom de Sheikh Mujibur Rahman. Des statues à son image ont été renversées dans tout le pays, et sa célèbre maison personnelle, transformée en musée, a été incendiée. Dans l’enceinte noircie, il ne reste plus que des amas de cendres et du verre brisé.
Un segment significatif de l’histoire nationale a été dévasté par les flammes. C’est à cet endroit qu’en 1975, le fondateur de l’indépendance et sa famille furent tués par un commando putschiste. Sheikh Hasina et sa sœur, en Allemagne lors de l’attaque, sont les uniques rescapées de ce carnage. Réagissant à cette perte, Jahan Afroze Tanisha, élève de terminale, exprime son désarroi : « C’est déplorable, ils n’ont pas simplement détruit l’histoire de notre nation mais aussi perturbé la rédaction de son nouveau chapitre ». Aidant à récupérer les livres épargnés par l’incendie pour les remettre aux autorités, elle déclare catégoriquement : « Ce que nous demandons, c’est la justice et non la destruction, et c’est notre devoir de restaurer la demeure du père de notre nation ». Toute autre personne affirme que la propriété est un patrimoine commun.
Une dizaine de personnes travaillent ardemment dans les ruines. Un mouvement de nettoyage orchestré par le mouvement Students Against Discrimination est en cours, comme l’indique fièrement une pancarte rédigée en bengali et en anglais. Ce mouvement est à l’origine des protestations qui ont commencé le 1er juillet et qui ont abouti à la démission de Sheikh Hasina. D’abord, le mouvement était contre le système de quotas pour le recrutement dans la fonction publique, mais il a rapidement gagné en ampleur. Suite à l’entrée en fonction le jeudi 8 août du gouvernement intérimaire du lauréat du Prix Nobel de la Paix, Muhammad Yunus, les jeunes s’efforcent de rétablir Dacca après des semaines de tumulte. Pendant ce temps, on constate que les policiers sont en retrait.
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