Rendez-vous à la Maison 36, située sur la rue Baribaïeva à Almaty, Kazakhstan, une adresse typique où la jeunesse urbaine se réunit pour savourer une bière en soirée. On n’imaginera pas y croiser un prêtre orthodoxe. Toutefois, on peut voir le père Iakov, confortablement vêtu, appréciant son café en terrasse.
Ce jour-là, cependant, son humeur contraste avec l’atmosphère joyeuse. Vladimir Iourevitch Vorontsov, comme il est connu civilement, a reçu une décision défavorable le 15 juillet : son exclusion de l’Église orthodoxe du Kazakhstan. Il considère cette décision, soutenue à Moscou par Kirill, le patriarche de toutes les Russies, comme arbitraire. Kirill cherche à conserver son influence sur les branches orthodoxes de l’ancien espace soviétique.
Le père Iakov ne sera désormais plus autorisé à célébrer une messe à la cathédrale de l’Ascension à Almaty, où il a servi pendant près de trois ans. « Je ne pensais pas qu’ils allaient si loin. La defroque est une sanction bien trop sévère », déplore le prêtre déchu. En fait, cela fait plus de deux ans qu’il rencontre des problèmes avec l’autorité ecclésiastique. Il a ouvertement exprimé son soutien pour les Ukrainiens dès le premier jour du conflit en Ukraine, le 24 février 2022, en rejoignant les 293 prêtres orthodoxes qui ont signé une lettre ouverte contre l’invasion russe.
Le père Iakov raconte, avec un chapeau de paille orné de pins des drapeaux ukrainien et kazakh, sa grande tristesse et son choc face à la radicalisation de la guerre par la Russie, bien qu’elle ait montré des signes de fascisme depuis un certain temps. Il avait espéré que l’Eglise orthodoxe russe userait de son influence pour maintenir la paix, mais il a été déçu. Le haut clergé russe a clairement soutenu l’invasion de l’Ukraine et le patriarche Kirill, ancien agent du KGB et dirigeant de l’église depuis 2009, a utilisé cette institution comme instrument de propagande du Kremlin. Il a même béni les missiles russes et organisé des prières en faveur de leur armée, comme lors de leur incursion en Syrie.
Le père Iakov est attristé que l’église ait dévié de sa mission impartie par le Christ – celle d’établir l’amour et la paix sur terre. Au lieu de cela, celle-ci prêche une guerre spirituelle contre l’Ukraine et l’Occident. Au Kazakhstan, pays de près de 20 millions de personnes, dont 3 millions sont des orthodoxes russes de la diapora russe, l’église est tout comme dans la plupart des anciennes nations soviétiques, sous le contrôle direct de Moscou. Le reste de cet article est destiné aux abonnés.
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