Est-ce que l’eau minérale naturelle reste naturelle une fois qu’elle a été purifiée à la suite d’une contamination bactériologique, y compris par des microbes d’origine fécale? Les autorités françaises contrôlent-elles correctement les producteurs d’eau minérale? Les dirigeants politiques ont-ils respecté la loi après avoir découvert en 2021 que de nombreuses entreprises – notamment Nestlé Waters – effectuaient des traitements de désinfection illégaux sur leurs eaux?
Fin janvier, l’information divulguée par Radio France et Le Monde a poussé la Commission européenne à réaliser un audit en mars. Les résultats de cet audit, publiés la veille du lancement des Jeux de Paris 2024 le 24 juillet, sont particulièrement durs envers la France et seront une priorité pour le prochain gouvernement français.
L’investigation de l’Office français de la biodiversité (OFB) a encore aggravé la situation. Selon Mediapart qui a dévoilé ces informations fin juillet, Nestlé a exploité illégalement une dizaine de forages dans les Vosges pendant plus de deux décennies, sans les autorisations et les contrôles nécessaires, ce qui a conduit à une surconsommation de la ressource.
Des « lacunes graves »
L’audit de Bruxelles a révélé des « lacunes importantes dans l’application du système de contrôle » des industriels. Les auditeurs ont pointé « l’absence de périodicité des contrôles officiels », une « collaboration inadéquate entre les administrations chargées des contrôles au niveau local et national » ainsi que « l’expérience insuffisante des inspecteurs ».
En particulier, ils remettent en question la manière dont la France a réagi après que les institutions de santé et les politiciens ont été notifiés en août 2021 des pratiques prohibées. Ils auraient dû « empêcher la commercialisation d’eaux minérales naturelles qui ne satisfaisaient pas les critères requis », récupérer les bouteilles déjà mises sur le marché, infliger des contraventions ou des sanctions aux entreprises mettant des produits non approuvés sur le marché. Aucune de ces recommandations de surveillance de la Commission n’a été mise en œuvre en temps voulu par les autorités françaises.
Ce n’est pas un simple détail. Selon un rapport du la Direction Générale de Concurrence, du Commerce et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) reçu par Mediapart, l’emploi de ces traitements prohibés pour les eaux minérales – qui, pour être conformes à cette certification, doivent être exemptes de toute souillure – a fait gagner plus de 3 milliards d’euros à Nestlé Waters sur une période de quinze ans. C’est l’argent que l’entreprise aurait perdu durant cette période, si les milliards de bouteilles d’eau décrites comme « minérales naturelles » avaient été vendues au même prix que l’eau dite « rendue potable par traitements ».
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