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7 août 2024 9 h 12 min

« Guerre Ukraine: Tension frontière, selon Russie »

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Parcourez tous nos contenus, y compris des articles détaillés et des comptes rendus sur le conflit en Ukraine. Les enquêtes, examens approfondis, et explications exhaustives du Monde révèlent les incertitudes d’un conflit prolongé en Ukraine. L’émotion avait envahi le Grand Palais lors du triomphe des escrimeuses ukrainiennes aux Jeux Olympiques de 2024. La vie quotidienne de Volodymyr Zelensky est un équilibre entre des interactions avec des militaires, des citoyens et des responsables politiques. Dans une interview, Zelensky a avoué que l’abandon de territoires ukrainiens était « une question extrêmement délicate ».

Le nouveau défi de l’armée ukrainienne est de contrer les drones russes. À Paris, un établissement dénommé la « Maison de l’Ukraine » défend les athlètes affectés par le conflit lors des JO. Nous répondons à vos questions les plus courantes. Comment la Russie et l’Ukraine utilisent-elles des drones ?

Selon un rapport publié en mai 2023 par un groupe britannique spécialisé en défense, la « guerre des drones » entre la Russie et l’Ukraine a atteint une intensité sans précédent. Il indique que les Ukrainiens perdaient environ 10 000 drones chaque mois sur le front, soit plus de 300 quotidiennement. À titre de comparaison, l’armée française compte un peu plus de 3 000 drones dans ses stocks.

Russes et Ukrainiens utilisent principalement de petits UAV (véhicules aériens sans pilote, en anglais) civils, économiques et largement disponibles. Leur fonction principale est l’observation du champ de bataille et l’orientation des forces ou du tir d’artillerie. Certains sont même modifiés pour transporter de petites charges explosives à lâcher sur des tranchées ou des véhicules blindés.

Bien que moins nombreux, les drones-kamikaze jouent un rôle crucial. Equipés d’explosifs, ces UAV sont envoyés au-dessus de la ligne de combat sans une cible préétablie. La Russie utilise à la fois les drones russes Lancet-3 et les Shahed-136 fabriqués en Iran. Malgré l’absence d’une armada maritime appropriée, l’Ukraine défie son adversaire avec des navires sans équipage, de petits kayaks télécommandés et bourrés d’explosifs (450 kilos de TNT).

L’importance des drones pour les opérations militaires est mise en évidence par les efforts ukrainiens et russes pour maintenir leurs forces armées opérationnelles, non seulement par des achats en vrac de drones civils, mais aussi par le développement de capacités de production locales. L’industrie nationale ukrainienne, qui en était à ses débuts lors du déclenchement de la guerre du Donbass il y a dix ans, s’est depuis intensifiée. Fin août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a annoncé qu’une réplique du drone russe Lancet était en voie de développement et serait prochainement lancée sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.

La Russie, entravée par les sanctions occidentales limitant son accès aux composants électroniques, éprouve des difficultés. Cependant, selon les services de renseignement américains, Moscou aurait commencé la construction d’une usine de drones dans la zone économique spéciale d’Alabouga, visant à produire des drones kamikazes de conception iranienne tels que le Shahed-136.

Quant à l’état des stocks de missiles russes, il est extrêmement difficile, voire impossible, d’obtenir des informations précises. Les agences de renseignement ukrainiennes fournissent régulièrement des mises à jour à ce sujet, mais leurs estimations sont sujettes à interrogations.

Andri Ioussov, un représentant de la direction générale du renseignement du ministère de la défense (GUR), divulgué par Liga.net, a indiqué que l’armée russe avait près de 2 300 missiles balistiques et de croisière avant le conflit et plus de 900 au début de l’année. A ces missiles s’ajoute une multitude de missiles antiaériens S-300, avec une portée de 120 kilomètres, et une quantité significative de S-400, une version plus récente avec une portée triplée. Vadym Skibitsky, l’adjoint du GUR, a estimé en août le nombre de missiles ayant une portée dépassant les 500 kilomètres à 585.

Concernant la production, elle aurait augmenté pour atteindre un taux mensuel de cent missiles balistiques ou de croisière, d’après plusieurs spécialistes. En octobre, la GUR a évalué cette production à 115 unités.

De plus, la Russie aurait acquis des missiles de courte portée de l’Iran et de la Corée du Nord, et continuerait à le faire. D’après Reuters, qui cite plusieurs sources iraniennes, 400 missiles iraniens de la gamme Fateh-110 (300 à 700 kilomètres) auraient été fournis à la Russie depuis janvier, moment où un accord aurait été établi. Le nombre de missiles nord-coréens importés par la Russie n’est pas connu, cependant, 24 ont été lancés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, selon le procureur général, Andriy Kostin. Sur la base de l’analyse des débris et des trajectoires, les experts pensent qu’il s’agit probablement de KN-23 et KN-24 avec une portée d’environ 400 kilomètres.

Et les avions de combat F-16?

En réponse à une requête de longue date du président ukrainien, les Etats-Unis ont approuvé en août 2023 le transfert d’avions de combat F-16 vers l’Ukraine. Bien qu’il y ait plus de 300 F-16 répartis dans neuf pays d’Europe, comme la Belgique, le Danemark, la Grèce, les Pays-Bas et le Portugal, tous ne peuvent pas immédiatement donner leurs avions.

Volodymyr Zelensky a mentionné le nombre de 42 F-16 promis à Kiev par les alliés occidentaux, mais cette information n’a pas été vérifiée. Le Danemark a promis de donner 19 avions, avec les 6 premiers livrés fin 2023, suivi de 8 autres en 2024 et 5 en 2025, selon Mette Frederiksen, la première ministre danoise. Les Pays-Bas, qui ont également promis des avions, ont en leur possession 42 unités, mais n’ont pas indiqué combien elles prévoient de transférer.

De plus, les aviateurs ukrainiens doivent être formés pour manœuvrer ces avions de combat américains. Onze pays de l’OTAN qui sont alliés de Kiev se sont engagés à former ces pilotes. L’OTAN a prévu que les troupes ukrainiennes seront prêtes à utiliser ces avions en combat au début de 2024, bien que certains experts estiment que cela pourrait prendre jusqu’à l’été de cette année.

Quel type d’aide militaire est fournie à Kiev par ses alliés ?

Deux ans après le commencement de la guerre à grande échelle, l’élan du support de l’Occident en faveur de Kiev semble s’amenuiser : il y a une diminution des aides récemment allouées entre août 2023 et janvier 2024 par rapport à la même période de l’année précédente, d’après le rapport le plus récent de l’Institut Kiel, publié en février 2024. Cette tendance pourrait se prolonger, avec le Sénat américain luttant pour obtenir l’approbation d’aides et l’Union européenne (UE) ayant rencontré d’énormes obstacles pour faire approuver une aide de 50 milliards le 1er février 2024, en raison du blocage par la Hongrie. Il convient de noter que ces deux paquets d’aide n’ont pas encore été inclus dans le dernier résumé de la situation par l’Institut Kiel, qui se termine en janvier 2024.

Les informations de l’institut allemand indiquent que le cercle de donateurs diminue et se centralise autour d’un groupe de pays : les États-Unis, l’Allemagne, et les pays du nord et de l’est de l’Europe, qui offrent à la fois un financement élevé et des armements avancés. Depuis février 2022, les pays soutenant Kiev se sont engagés à concurrence d’au moins 276 milliards d’euros pour les aspects militaires, financiers et humanitaires.

En termes absolus, les pays les plus opulents ont été les plus généreux. Les États-Unis sont largement les premiers donateurs, avec plus de 75 milliards d’euros d’aide annoncés, dont 46,3 milliards en aide militaire. Les pays de l’Union européenne ont fait part d’aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et d’aides collectives provenant des fonds de l’Union européenne (93,25 milliards d’euros), pour un total de 158,1 milliards d’euros.

En évaluant les contributions de chaque pays à l’aide ukrainienne par rapport à leur produit intérieur brut (PIB), le classement se modifie. Les États-Unis se retrouvent relégués à la vingtième place, avec 0,32 % de leur PIB, bien derrière des pays proches de l’Ukraine ou d’anciens alliés soviétiques. Il est l’Estonie qui mène le classement avec une aide équivalente à 3,55% de son PIB, suivie par le Danemark (2,41 %) et la Norvège (1,72 %). Les deux dernières places du top 5 sont occupées respectivement par la Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %). Ces trois pays baltes, partageant des frontières avec la Russie ou son alliée, la Biélorussie, sont parmi les donateurs les plus généreux depuis le début de la crise.

Par rapport à la part de PIB, la France se retrouve à la vingt-septième place, ayant engagé seulement 0,07 % de son PIB, un peu derrière la Grèce (0,09 %). L’assistance fournie par la France diminue de façon constante depuis le début de l’invasion russe en Ukraine – en avril 2023, la France était à la vingt-quatrième place, et s’était classée treizième durant l’été 2022.

Et qu’en est-il des tensions à la frontière ukraino-polonaise ?

Les tensions sont perceptibles depuis des mois entre l’Ukraine et la Pologne, principalement en raison du transport de céréales en provenance d’Ukraine. Au printemps 2022, la Commission européenne a institué des « canaux de soutien » pour faciliter l’exportation et la vente de marchandises agricoles ukrainiennes vers l’Afrique et le Moyen-Orient, exemptes de toute taxe douanière. Cependant, presque la moitié des céréales ukrainiennes parviennent à leur destination finale ou sont en transit dans l’UE depuis le début des tensions, selon la Fondation Farm, un groupe de réflexion sur les questions agricoles internationales. Ces céréales sont vendues à un tarif nettement inférieur à celui du blé cultivé dans l’UE, en particulier dans les pays de l’Europe centrale.

En raison de l’impact de ces céréales sur le marché local et sur les revenus de leurs agriculteurs, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont unilatéralement arrêté leurs importations en avril 2023. Cet embargo a été approuvé par Bruxelles, à condition qu’il n’entrave pas le transit vers d’autres pays et ne dure que quatre mois. Croyant que le problème sous-jacent n’avait pas été résolu, Varsovie a choisi de maintenir ses frontières fermées aux céréales ukrainiennes à la fin de l’été, bien que Bruxelles estime que l’embargo n’était plus justifié, ses études indiquant qu’il n’y avait plus « de distorsion des marchés nationaux pour les céréales ».

Les fermiers de Pologne ont mis en place une obstruction à la frontière qui sépare leur pays de l’Ukraine pour stopper l’entrée des véhicules de transport ukrainiens dans leur nation. Ces manifestants exigent une interdiction totale des produits alimentaires et agricoles venant de l’Ukraine. Ils sont mécontents en raison de l’augmentation dramatique de leurs dépenses de production au moment où les stocks sont débordés et les tarifs sont extrêmement bas. Le chef de l’Etat ukrainien avait déclaré en début d’année 2024 que le blocage de la frontière polonaise était une preuve du déclin de la solidarité envers son pays, et a demandé une discussion avec la Pologne. Il a aussi souligné que seule la ville de Moscou se réjouissait de ces tension et a critiqué la propagation de messages de soutien à Poutine.