L’organisation non gouvernementale Amnesty International a déclaré que treize individus sont décédés le jeudi 1er août suite aux manifestations issues de l’insatisfaction envers la gouvernance défaillante et la flambée du coût de vie au Nigeria. L’ONG accuse les forces de sécurité d’avoir intentionnellement tué des protestataires pacifiques exprimant leur mécontentement face à « l’extrême pauvreté ». Le jour précédent, des allégations selon lesquelles la police aurait attaqué les manifestants ont été réfutées par le responsable des forces de police.
D’après Amnesty, au cours des marches protestataires, six morts ont été enregistrées à Suleja (Centre), quatre à Maiduguri (Nord-Est) et trois à Kaduna (Nord-Ouest), attirant des milliers de citoyens dans les rues. « Selon nos rapports, là où les décès se sont produits, des membres des forces de sécurité ont apparemment employé des méthodes mortelles contre ceux qui manifestaient contre la faim et l’extrême misère », a déclaré Amnesty dans une annonce rendue publique sur la plateforme sociale X. De son coté, la police à Maiduguri a confirmé la mort de quatre personnes suite à des déflagrations, sans donner plus de détails.
Le Nigeria, le pays le plus densément peuplé d’Afrique, est confronté à une crise économique majeure suite à des réformes engagées par le président Bola Tinubu, au pouvoir depuis mai 2023. L’inflation des produits alimentaires a dépassé 40% et le coût de l’essence a triplé. Les manifestants, sous le nom de #EndbadGovernanceinNigeria (« Arrêter la mauvaise gouvernance au Nigeria »), demandent au président de revoir certaines réformes, telles que l’annulation de la subvention sur les carburants, et de « mettre un terme à la douleur et à la faim ».
Une autre journée de protestation s’est tenue vendredi, marquée par des mesures de sécurité accrues. La loi martiale a été imposée dans cinq États, et à Abuja, la capitale fédérale, des gaz lacrymogènes ont été utilisés contre un petit nombre de protestataires, comme observé par un reporter de l’Agence France-Presse (AFP). Dans une déclaration publiée sur X, Kayode Egbetokun, le directeur de la police, a indiqué qu’il avait mis en place un « état d’alerte rouge » pour faire face à des « menaces contre la sécurité et la paix publique ».
Vendredi, une ambiance plus apaisée était présente à Kano, la deuxième plus grande ville du Nigeria, qui était le théâtre d’hostilités intenses entre les forces de l’ordre et les protestataires la veille. Des couvre-feux ont été décrétés dans cet État ainsi que dans ceux de Yobe, Borno, Katsina et Jigawa, tous situés dans le nord du Nigeria. À Lagos, le cœur économique du pays, une petite foule de personnes s’est rassemblée vendredi dans le secteur d’Ojota. Jeudi, près d’un millier d’individus ont défilé pacifiquement en criant des slogans tels que « Tinubu Ole » (« Tinubu est un voleur » en yoruba).
Avant le déroulement des protestations de jeudi, les porte-parole du gouvernement avaient exhorté les citoyens à donner du temps aux réformes pour produire des bénéfices et avaient souligné la liste des mesures d’aide mises en place pour soulager les difficultés économiques, y compris l’augmentation du salaire minimum et la distribution de céréales dans les différents États. Malgré les avertissements des gouvernants, les organisateurs de la manifestation, qui représentent une coalition spontanée de groupes de la société civile, ont promis de poursuivre leurs actions dans les jours à venir.
La dernière manifestation d’ampleur au Nigeria s’est produite en octobre 2020, elle ciblait l’élimination d’une brigade de police impliquée dans des abus. Bien que cette unité ait été démantelée, au moins une dizaine de manifestants ont perdu la vie, selon Amnesty International, avec le gouvernement et l’armée refusant d’assumer toute responsabilité.
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