Alors que le loup recommence graduellement à s’étendre sur un territoire de plus en plus vaste, la chasse illégale dirigée contre cette espèce protégée semble se renforcer. Plusieurs cas signalés au cours des dernières années donnent un aperçu de ce phénomène croissant. En juin 2023, trois individus ont été poursuivis pour avoir empoisonné un loup à Crupies, dans la Drôme, y compris le représentant local du réseau loup de l’Office français de la biodiversité (OFB), celui-ci ayant avoué avoir pénétré l’agence pour obtenir des informations sur les packs de loups. L’année précédente, deux loups avaient été retrouvés morts, empoisonnés dans le parc national de la Vanoise. En 2021, une louve a été retrouvée pendue devant la mairie d’un village de Champsaur, situé dans les Hautes-Alpes. La même année, le président de ce département, Jean-Marie Bernard (Les Républicains), a été condamné pour avoir offert une queue de loup à une préfète lors de sa cérémonie de départ.
Bien que l’ampleur du braconnage, généralement secret, n’est pas réellement quantifiée officiellement, plusieurs indices indiquent une recrudescence. Un groupe de naturalistes, qui surveille de près trente-six packs de loups dans le Sud-Est à l’aide de caméras-trappes, a signalé que plus du quart de ces meutes auraient été victimes de braconnage en 2023 : disparitions suspectes, loups photographiés avec des pattes mutilées ou un collier autour du cou … « On observe une augmentation constante de ces actes depuis quelques années », déclare Roger Mathieu, représentant loup à France Nature Environnement Auvergne-Rhône-Alpes, qui dirige ce groupe.
Un membre anonyme du réseau loup de l’OFB a partagé ses observations des quatre meutes qu’il surveille dans le Vercors depuis trois ans. Il a constaté leur stabilité jusqu’à cette année. Cependant, en février, un mâle alpha a disparu sans explication, et une louve a été retrouvée avec un collet autour de la tête. Au printemps, la troisième meute a été exterminée. Dans le Haut-Var, un autre observateur de loups raconte qu’après l’installation d’une meute en 2018, le braconnage est devenu une pratique courante, bien qu’il n’y ait pas d’élevage dans la région. Sur les onze loups de cette année, il ne reste qu’un seul survivant.
Par ailleurs, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) a signalé une augmentation significative des cas d’empoisonnement de rapaces. En 2022, environ 250 rapaces empoisonnés ont été retrouvés, comparativement à moins de 50 avant 2015. Cédric Marteau, directeur à la LPO, explique que le poison est généralement placé sur le gibier, ciblant principalement les loups. De ce fait, les rapaces, qui ont une forte capacité de détection, sont souvent les victimes indirectes de cette pratique.