Comment vit-on et vote-t-on dans un pays qui a connu une baisse significative de sa population au cours de la dernière décennie ? Le 28 juillet, un appel aux urnes a été lancé aux 21 millions d’électeurs vénézuéliens pour décider du sort de Nicolas Maduro, le président sortant et candidat au troisième mandat, et de Edmundo Gonzalez, le candidat unifié des grandes factions politiques opposantes.
Il est estimé que 4 à 5 millions d’électeurs ne pourront pas exprimer leur droit de vote en raison de l’émigration. Seuls 69 000 Vénézuéliens expatriés ont réussi à s’inscrire sur les listes électorales disponibles dans les consulats. Les analystes scrutent attentivement cette ‘abstention forcée’, suggérant le rôle crucial des migrants dans le processus électoral, alors que l’avenir de la revolution bolivarienne initiée par Hugo Chavez il y a 25 ans et de ses partisans, les chavistes, est en jeu.
Ruben Sulbara, 73 ans, résidant seul à Caracas sans sa femme qui a rejoint leur fille aux Etats-Unis il y a deux ans, croit fermement en ce que Nicolas Maduro et les médias avancent. Il est persuadé que les sanctions imposées par Washington sont le principal facteur de la crise économique du pays, de l’émigration qui a fracturé les familles et de son propre malheur. Cependant, il reconnaît que, si elles en avaient eu l’opportunité, sa femme et sa fille auraient voté pour Edmundo Gonzalez.
L’opposante Maria Corina Machado fait des promesses alléchantes de réunification des familles, ce qui suscite l’enthousiasme de la foule. À Maturin, une ville de l’est du pays, un jeune garçon brandit une affiche demandant : « Ramène-moi mes parents ».
Mme Machado, lauréate des primaires de l’opposition, a été barrée par la justice dans son ambition de se présenter à la présidentielle. Au cours des dernières semaines, elle a arpenté le pays pour soutenir la candidature d’Edmundo Gonzalez. Âgé de 74 ans, il se déplace rarement. « En faisant la réunification familiale un point important de sa campagne, Maria Corina Machado a touché une corde sensible, a observé l’activiste des droits de l’homme Rafael Uzcategui. Dans un pays fatigué des récits idéologiques, l’émotion est un levier puissant. »
Absence de données statistiques
« Qu’elles soient riches, moins riches, pauvres, chavistes ou antichavistes, toutes les familles vénézuéliennes sont affectées par l’émigration », souligne le chercheur Ronal Rodriguez de l’Université du Rosaire à Bogota, en Colombie.
D’après les entités internationales, y compris les enfants dans les chiffres, plus de 7,7 millions de Vénézuéliens se sont exilés. C’est un chiffre sans précédent pour un pays qui n’est pas en guerre. La Plate-forme régionale de coordination inter-organisations pour les réfugiés et les migrants du Venezuela, qui publie le chiffre, note que le nombre est « probablement » sous-évalué. Cela place le pays en troisième position mondiale pour l’émigration, après la Syrie et le Soudan.
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