Emilie Tronche, à 28 ans, émerge encore un peu abasourdie d’une séance photo, son tout premier, en plein après-midi de juin. Elle s’assoit en face de nous à une terrasse de café dans le deuxième arrondissement de Paris. Temporairement dans la ville avant de retourner dans sa résidence à Angoulême, où elle a déménagé depuis ses études en animation, Emilie enchaîne des séances d’interviews avec différents médias. Elle a du mal à croire l’intérêt suscité par son travail, qui ne s’est pas affaibli même trois mois après la diffusion de sa série d’animation phénoménale, Samuel sur Arte. Totalisant plus de 36 millions de vues sur le site web de la chaîne et les réseaux sociaux, elle est surprise et amusée de voir des fans se faire tatouer à l’image de Samuel.
La série, avec ses 21 épisodes de cinq minutes chacun, nous fait entrer dans le journal intime de Samuel, un garçon de dix ans à la chevelure ébouriffée, ses premiers sentiments pour l’amour et son discours aussi simple que touchant. Le moment clé est le passage de l’école primaire au collège. C’est Emilie qui donne sa voix à Samuel et à tous ses camarades du terrain de jeu, en plus d’écrire le scénario et de dessiner les personnages dans un style simple en noir et blanc. Ce projet « fait maison » est loin des normes de l’industrie auxquelles elle a été formée à l’école, et elle n’aurait « jamais parié » qu’il serait remarqué.
Dans son œuvre remarquablement sensible, qui lui a valu le prix Pierre Chevalier à Cannes, la réalisatrice Emilie Tronche explore une partie de l’essence de sa propre enfance : l’époque 2000 des feuilles Diddl, des Tamagotchi et de Tokio Hotel. Ses souvenirs personnels et les discussions teintées de nostalgie avec ses sœurs, lui ont permis de revisiter tous les petits détails qui ont marqué cette période. Ces éléments ont donné à Samuel une forte capacité d’identification, poussant les spectateurs à griffonner leurs propres anecdotes dans des journaux animés, en reprenant les codes de la série sur les médias sociaux ces derniers mois.
Comme l’enfance « dans la lune » de Tronche, la petite ville où évolue Samuel est similaire à celle où elle a passé sa propre enfance et adolescence : Sucy-en-Brie, dans le département de l’Ile-de-France. Située à l’extrémité de la ligne du RER A, c’est une commune typique entre ville et campagne où « il ne se passe pas grand-chose et qui est peu représentée à l’écran », selon elle. Dans ce « petit monde », tout le monde se connait et Emilie a retrouvé les mêmes camarades de classe tout au long de son parcours scolaire, de la maternelle au lycée. Elle a passé une enfance aisée avec un père travaillant dans la finance et une mère enseignante en CM2 – une excellente source d’inspiration pour Tronche, qui a même participé à des sessions d’immersion dans la classe de sa mère pour enrichir ses épisodes.
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