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« L’exhibitionniste du travail hybride »

La sublime vallée de la Clarée, située dans les Hautes-Alpes, était parcourue par une navette de randonneurs lorsqu’un téléphone a retenti. Son propriétaire, vêtu de la tête aux pieds en Quechua, a décroché. Il a affirmé qu’il était en télétravail, ou plutôt en « tracances » : un concept qui allie le plaisir de vacances et le travail mental. Un exemple parfait de ce phénomène est l’Astran, un espace de coworking à Saint-Briac-sur-Mer (Ille-et-Vilaine), où l’on peut voir des individus habillés décontractés avec des chemises repassées juste pour les appels vidéo. Ce scénario étrange est l’un des paradoxes de la vie actuelle : c’est aussi difficile de profiter des vacances sans tomber sur des personnes qui travaillent. Ce mélange est le fruit de plusieurs facteurs dont la quasi-omniprésence du Wi-Fi, la réduction du poids des ordinateurs portables et l’acceptabilité grandissante du travail à distance. En effet, au cours de l’été 2022, 35% des individus envisageaient de travailler à distance depuis leur lieu de vacances, selon une recherche de l’Insee.

Cependant, il est important de préciser que le terme « tracances », bien que populaire et inspiré du mot anglais workation, ne possède pas de statut légal. Personne n’est supposé présenter ses dates de « tracances » à son patron. Ce terme est plutôt un concept flou qui peut couvrir plusieurs réalités : de quelques jours de télétravail à la plage accolés à un break de deux semaines, à une vie professionnelle complètement à distance organisée depuis la Thaïlande.

L’addiction au travail se manifeste chez l’individu, qui même pendant ses congés, ne peut s’empêcher de répondre à la moindre notification sur Slack. Ce type de personne est assez singulier car il arrive à grignoter du temps de travail durant ses vacances fragmentées et vice versa. Paul, un chef de produit numérique, en vacances dans l’Hérault, confirme cela, disant qu’il avait l’impression de perdre du temps de vacances en s’isolant pour une visioconférence.

Quelques mois auparavant, Asher Perlman, un Américain, avait publié une illustration sur Instagram. Elle représentait un jeune homme étendu sur la verdure avec son ordinateur à ses côtés. Le commentaire sur l’image soulignait l’absurdité des travailleurs qui s’illusionnent en pensant qu’ils ne travaillent pas – une notion connue sous le terme de ‘tracances’.

Le dilemme du travailleur en vacances s’exprime clairement par le lieu qu’il choisit pour installer son espace de travail provisoire. Logiquement, il serait plus confortable et adéquat de se placer dans une pièce avec l’air conditionné, une table stable à une hauteur appropriée, et à l’ombre. Cependant, la perspective de rester confiné dans une pièce de 8 mètres carrés avec son ordinateur peut sembler oppressante. Pour accéder à la suite de cet article, il faut être abonné.

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