Les contestataires des réservoirs de substitution ont établi un « village de résistance pour l’eau » le 16 juillet à Melle, dans le département des Deux-Sèvres. Cette action doit faire la une des actualités lors de deux journées de mobilisation prévues les 19 et 20 juillet. Pendant la période électorale, le Nouveau Front populaire (NFP) s’est engagé à instaurer un moratoire sur ces bassins synthétiques dès son arrivée au pouvoir.
En avril, suite aux manifestations d’agriculteurs mécontents, le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, a promis la construction d’une centaine de ces réservoirs d’eau, qui devraient être opérationnels d’ici fin d’année. Par ailleurs, le gouvernement a annoncé la création d’un fonds dédié à l’irrigation agricole de 20 millions d’euros pour 2024, et de 30 millions d’euros pour 2025. Il a également prévu un poste de délégué interministériel pour la gestion de l’eau en agriculture pour une période de trois ans. Pour ce poste, Martin Gutton, le directeur de l’agence de l’eau Loire-Bretagne a été nommé lors de la dernière réunion du conseil des ministres, présidé par Gabriel Attal, le 16 juillet.
La course pour stocker l’ « or bleu », prédite par certains et exacerbée par les effets évidents du changement climatique, où en est-elle? L’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) a publié le 28 juin l’étude Explore 2, prévoyant des étés de plus en plus longs et secs sur la France métropolitaine ainsi qu’une augmentation des précipitations hivernales dans le nord et l’est du pays. Extraire l’eau en hiver, quand son abondance est à son sommet, et la conserver pour utilisation durant les mois d’été, lorsqu’elle se fait plus rare, apparaît comme une solution sensée, régulièrement avancée par les défenseurs des réservoirs de substitution.
Cependant, cette proposition simplifie excessivement la situation. Les scientifiques responsables de l’étude Explore 2 mettent en avant les incertitudes majeures quant aux conditions météorologiques prévues en fin de siècle, ainsi que la grande variabilité d’une année à l’autre. Prédire la fréquence à laquelle ces vastes réservoirs – une expression désignant plusieurs hectares de terre excavée, contenue et remplie principalement en pompant l’eau des nappes phréatiques– pourront être remplis est impossible.
Le monde agricole est divisé sur ce sujet.
Par ailleurs, l’agriculture, un secteur de production qui utilise 62% de l’eau disponible en France, est fractionnée par le stockage hydraulique. Malgré les appréhensions de pénuries probables, la superficie des terres irriguées s’est agrandie de 23% entre 2010 et 2020. Néanmoins, les bassins « immobilisent l’accès à l’eau dans une région », regrette la Confédération paysanne dans une lettre ouverte du 15 juillet. Tout le monde n’aura pas accès à ces ressources, loin s’en faut. En fait, des acteurs émergents, tels que les maraîchers et arboriculteurs, devraient également avoir la possibilité de bénéficier d’une répartition des volumes d’eau. Le syndicat agricole minoritaire condamne l’apparition d’une « spéculation sur les droits de l’eau, particulièrement lors du transfert de terres ». Il déplore le « manque de transparence » dans ces affaires et plaide en faveur d’une répartition équitable, y compris avec les autres acteurs du territoire.
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