Suite à de nombreux jours d’affrontements mortels entre forces de l’ordre et étudiants à travers le pays, la capitale du Bangladesh, Dacca, a été interdite de toute nouvelle manifestation par les autorités le vendredi 19 juillet. Ces dernières ont également déclaré avoir arrêté un des leaders majeurs de l’opposition.
Les manifestations, qui ont débuté au début du mois de juillet pour protester contre un système de quotas dans les recrutements publics, ont rapidement dégénéré en violences pendant la semaine, causant trente-neuf morts, dont trente-deux le jeudi.
Au lever du jour vendredi, les rues habituellement animées de Dacca étaient vides mais les traces des affrontements étaient apparentes: bâtiments gouvernementaux brûlés, véhicules incendiés, briques éparpillées sur les routes, et l’internet était toujours hors service.
Des heurts ont de nouveau éclaté dans la capitale durant la matinée. Des centaines d’étudiants ont bloqué des routes dans le quartier commercial chic de Banani, comme l’a rapporté un correspondant de l’Agence France-Presse (AFP). Selon des témoins, les forces de l’ordre ont tiré des grenades lacrymogènes en plusieurs endroits de cette métropole de 20 millions d’habitants.
Alors que sept cents personnes ont été blessées, Habibur Rahman, le chef de la police de la ville, a déclaré à l’AFP que tous « les rassemblements, processions et réunions publiques à Dacca » étaient désormais interdits pour « assurer la sécurité publique ». La police a également confirmé l’arrestation de Ruhul Kabir Rizvi Ahmed, porte-parole et secrétaire général adjoint du Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), un des chefs principaux de l’opposition à Dacca, sans donner plus de détails sur les motifs de son arrestation.
Dans une déclaration récente, elle a pointé du doigt « des agitateurs » responsables de « la mise à feu, du vandalisme et des actions destructrices » dans des infrastructures publiques, y compris le bâtiment de la chaîne nationale BTV, suite à une « coupure quasi universelle » d’internet sur l’ensemble du territoire.
Faruk Hossain, le porte-parole de la police de Dacca, a déclaré à l’AFP qu’une « centaine de policiers ont été touchés lors des confrontations » de jeudi et qu’une « cinquantaine de postes de police ont été incendiés ». Il a averti que si ces actes destructeurs persistent, ils seront « contraints d’appliquer l’intégralité de la loi ».
La police est responsable de plus des deux tiers des morts recensés, selon des documents obtenus par l’AFP provenant de sources hospitalières. Plus de sept cents personnes ont été blessées jeudi lors d’affrontements violents entre les manifestants et la police, incluant cent quatre policiers et trente journalistes, d’après la chaîne privée Independent Television, qui a indiqué que vingt-six des soixante-quatre districts du pays ont signalé des conflits.
Fermeture des établissements scolaires
Les protestations – presque journalières depuis le début du mois de juillet – sont dirigées contre le maintien de quotas de recrutement dans la fonction publique, qui attribuent plus de la moitié des emplois à certains groupes, notamment aux descendants des vétérans de la guerre d’indépendance contre le Pakistan en 1971.
Les étudiants demandent un processus de recrutement basé sur le mérite, considérant que ce système privilégie les enfants des partisans de la première ministre, Sheikh Hasina, qui dirige le pays depuis 2009 et est critiquée par les opposants qui l’accusent de chercher à supprimer toute opposition pour consolider son pouvoir.
Au fur et à mesure que les jours passent, les manifestations au Bangladesh prennent de plus en plus d’ampleur, avec des affrontements éclatant dans plusieurs villes. En conséquence, les autorités ont dû fermer les institutions scolaires et universitaires pour une période indéfinie afin de faire face à la situation qui ne cesse de se détériorer. La police antiémeute a du faire face à des étudiants qui ont érigé des barrages, entravant ainsi plusieurs voies de circulation.
Selon Mubashar Hasan, un expert du pays de l’Université d’Oslo, cette explosion de colère s’insurge contre l’Etat qu’ils jugent oppressant. Les manifestants accusent la dirigeante Hasina de s’accrocher au pouvoir de manière autoritaire et contestent son leadership.
Ali Riaz, un professeur de politique de l’université d’Etat d’Illinois, confirme que cette situation résulte d’un mécontentement croissant parmi la jeunesse suite à la privation de leurs droits économiques et politiques, qui couve depuis plusieurs années. Il souligne également que les quotas d’emploi sont perçus comme le reflet d’un système injuste.
Bidisha Rimjhim, une manifestante de 18 ans, exige que la première ministre présente des excuses en premier lieu et que justice soit rendue pour leurs compatriotes qui ont perdu la vie dans ce conflit.
Dans cette situation explosive, l’accès à internet est toujours interrompu sur le territoire national selon Netblocks, une organisation de défense du réseau basée à Londres. Selon l’organisation, ces perturbations entravent la communication entre les familles et empêchent la documentation des violations de droits humains.
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