La plus grande espèce de rapace en Europe, le pygargue à queue blanche, est maintenant en « danger critique » d’extinction en France, où elle est strictement protégée. On estime que moins de 30 spécimens survivent sur le territoire français, à la fois en liberté et en captivité. Deux récents cas judiciaires ont souligné cette situation préoccupante.
Le premier implique un chasseur de 35 ans de l’Isère qui a été condamné à payer 61 300 euros de dommages et intérêts par le tribunal correctionnel de Grenoble pour avoir abattu une femelle pygargue le 24 février. Celle-ci avait été réintroduite dans la nature quelques mois plus tôt par la LPO après être élevée dans le cadre d’un programme scientifique national. Le chasseur a également été condamné à quatre mois de prison avec sursis et son permis de chasse a été révoqué. Son demi-frère a également été condamné pour avoir participé au déplacement du cadavre et la récupération de quatre plumes de l’oiseau, dont deux ont été récupérées lors d’une perquisition de leurs domiciles.
Dans un autre cas aux Ardennes, trois individus ont été arrêtés suite à la découverte d’un pygargue mort à proximité d’une zone d’étangs, identifié grâce à sa balise télémétrique. L’autopsie a révélé que l’oiseau avait ingéré des poissons imprégnés de carbofuran, un pesticide interdit en France depuis 2008, selon l’Office français de la biodiversité (OFB) et la gendarmerie.
L’enquête menée par l’unité environnementale régionale du parquet de Troyes a réussi à identifier l’individu qui possédait le bassin. Des dizaines de kilogrammes d’insecticides, ainsi que d’autres substances nocives pour les oiseaux, ont été découverts chez cet individu, provoquant le décès de nombreux oiseaux tels que les cormorans, les cigognes et les hérons. Le propriétaire, qui avait déjà été mis en cause par la justice et l’OFB pour des incidents antérieurs d’empoisonnement d’espèces protégées, a été arrêté avec deux autres personnes.
Deux d’entre eux, qui ont admis leur culpabilité, seront jugés devant le tribunal de Troyes le 30 août pour des infractions relatives à la destruction d’espèces protégées, à l’utilisation et à la possession illégales de produits phytosanitaires, et à la chasse et à l’armement, selon le parquet. Le troisième individu a été innocenté.
Un « meilleur suivi des espèces »
Pour les partisans de la protection de la biodiversité et des oiseaux, ces deux poursuites judiciaires ont été rendues possibles grâce à un suivi plus rigoureux des espèces, en particulier celles qui ont été réintroduites. Cédric Marteau, le directeur de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), déclare que la poursuite en justice de ces deux affaires de braconnage démontre les effets bénéfiques d’un « meilleur suivi des espèces ». Il attribue cette amélioration aux balises utilisées pour suivre les oiseaux, ainsi qu’à la prise de conscience accrue des juges concernant la destruction de ce patrimoine naturel. « Plus nous utilisons ces dispositifs, plus nous réalisons que c’est loin d’être insignifiant », affirme Cédric Marteau. Il ajoute même que pour certaines espèces protégées, l’empoisonnement ou la chasse sont les principales causes de décès.
Selon la LPO, la régulation des « destructions illégales » est encore loin d’être aussi efficace qu’elle pourrait l’être et ils ont insisté sur la nécessité de maintenir une politique de suivi de la libération des oiseaux. Cédric Marteau a conclu en disant : « Si la justice commence à punir sévèrement la dégradation de ce patrimoine naturel, on peut s’attendre à un changement de comportement et à l’éradication des actes malveillants ».
Jacques-Olivier Travers, qui dirige les Aigles du Léman – un lieu consacré à l’étude et à la préservation des rapaces – a qualifié cette action de » décision marquante ». Il a également reconnu que le « sentiment d’impunité » est toujours présent parmi les chasseurs.
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