Une manifestation contre la construction de mégabassines est prévue pour se dérouler à Poitou du mardi 16 juillet et toute la semaine, sous une surveillance policière stricte. Les organisateurs – dont le collectif Bassines non merci, le mouvement des Soulèvements de la Terre, Attac, l’union syndicale Solidaires et la Confédération paysanne parmi 120 entités – envisagent la participation de milliers de personnes.
Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a estimé lundi que le nombre de participants attendus serait « entre 6 000 et 8 000 », dont mille pourraient être qualifiées de « dangereuses, violentes ou radicalisées ». Pour répondre à cette menace, plus de 3 000 forces de l’ordre, cinq hélicoptères et une dizaine de drones seront déployés, car les autorités craignent que des protestataires « radicalisés » puissent causer des « violences majeures ».
Les organisateurs ont néanmoins exhorté la semaine dernière les gens à continuer de participer malgré « les intimidations policières et les éventuelles interdictions », en guise de protestation contre les mégabassines. Cette « Ville de l’eau » se déroulera à Melle, dans les Deux-Sèvres, non loin de Sainte-Soline où, en mars 2023, les travaux sur un réservoir d’eau litigieux avaient provoqué des affrontements violents entre des militants radicaux et la police lors d’une manifestation alors interdite.
Outre les ateliers, les débats et les événements festifs qui auront lieu à la Ville de l’eau, deux manifestations se dérouleront vendredi sur le site de la future bassine à Saint-Sauvant (Vienne) et samedi au terminal agro-industriel du port de La Rochelle. Les organisateurs insistent que ces actions sont partie de « actes de désobéissance civile » visant à « obtenir un moratoire » sur la construction des réservoirs.
Actuellement, seulement le Village de l’eau a été officiellement déclaré et la ville de Melle, qui l’héberge, détient le seul pouvoir pour l’interdire. Les manifestations en revanche, n’ont pas fait l’objet d’une déclaration officielle. Plusieurs convois, venant de différentes régions ainsi que de la Belgique, de l’Allemagne et de l’Italie, sont attendus sur le site. M. Darmanin a précisé qu’« une centaine de militants d’extrême gauche » se sont vus interdits d’entrée en France et « une vingtaine de personnes « fichées S » d’extrême gauche ou d’écologie radicale » ont été recensées « surtout à Melle ».
Plus de 3000 gendarmes avaient été déployés en 2023 à Sainte-Soline, où plus de 5000 grenades lacrymogènes avaient été lancées en moins d’une heure et demie pour disperser les manifestants. La Ligue des droits de l’homme, qui dépêchera à nouveau des observateurs cette semaine, avait à l’époque dénoncé « un emploi disproportionné et non discriminant de la force » et des « obstructions aux secours » pour les blessés, ce que les autorités ont réfuté.
La Coordination rurale invite à l’auto-défense
Face à la montée de la tension dans le secteur agricole, la Confédération paysanne invite à « sortir de la confrontation destructrice et de l’impasse » pour reprendre le dialogue sur le partage de l’eau, une question clé dans le débat sur les réserves d’eau. Les réserves de substitution, conçues pour stocker l’eau prélevée dans les nappes phréatiques pendant l’hiver pour irriguer les cultures en été, sont selon leurs défenseurs une nécessité pour survivre face au changement climatique. À l’opposé, leurs opposants y voient une « appropriation » de l’eau par l’agro-industrie.
La Coordination rurale a exhorté à la prudence face à l’éventualité d’une guerre civile dans nos régions agricoles, tout en encourageant l’autodéfense et la réalisation d’une manifestation déterminée et paisible vendredi à Melle, en soutien des forces de sécurité. Le syndicat, doté d’une grande influence dans la Vienne et bénéficiant du soutien actif de ses troupes de Lot-et-Garonne, a insisté sur le fait que les agriculteurs locaux prendraient les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et celle de leur métier. En réponse à cela, M. Darmanin a rappelé que, dans une République, l’état est indiqué comme le seul détenteur du pouvoir par le biais des gendarmes, des policiers et des préfets.
D’autre part, la FNSEA, leader dans le secteur agricole, appelle à la retenue et au sens de la responsabilité. Selon les propos rapportés par l’Agence France-Presse, Hervé Lapie, son secrétaire général, a fermement déclaré qu’il était inadmissible d’organiser un rassemblement non autorisé, en excluant de monter leur propre milice et en accusant leurs rivaux de vouloir attirer l’attention en prévision des élections professionnelles dans six mois. La dernière manifestation des militants contre les bassines organisée le 11 mai dans le Puy-de-Dôme s’est déroulée sans interdiction et sans incident.
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