Dans le but de reconnecter sa génération avec l’information, Gaspard G, un influent youtubeur de 26 ans avec près d’un million d’abonnés, a initié des discussions concernant la difficulté des médias traditionnels à attirer la jeune génération, lors d’un événement qui a eu lieu le 13 juillet. Gaspard G, qui a acquis sa notoriété grâce à des vidéos profilant des figures politiques, était en compagnie de Charlie Danger, une créatrice de contenu, lors du deuxième jour du Festival international de journalisme à Couthures-sur-Garonne.
Charlie Danger possède une chaîne YouTube intitulée « Les Revues du monde » avec plus de 984 000 abonnés, où elle traite de sujets liés à l’histoire et à l’archéologie. Ces deux personnalités d’Internet ont parlé de leur montée en notoriété et des transformations de leur métier. Charlie Danger raconte avoir débuté seule, prenant en charge tous les aspects de la création de contenu, un processus très prenant. « Petit à petit, on s’équipe, on recrute », explique Gaspard G, qui travaille maintenant entouré d’une équipe de cinq employés et de collaborateurs externes pour les questions administratives et de recherche.
Confronté à la question de savoir s’ils ne fonctionnent pas essentiellement comme une petite rédaction, Gaspard G exprime ses réserves quant à l’utilisation du terme « journaliste », en évoquant sa collaboration avec des annonceurs. En réponse à la question d’un participant sur la façon dont ils trient les sources pour leur contenu, Charlie Danger admet que leur procédé ressemble à du travail journalistique, avec les sources mises à disposition dans la description de la vidéo.
Les jeunes apprécient particulièrement les contenus en ligne crédibles, avis partagé par deux youtubeurs ainsi que par Mehdi Khelfat, journaliste à la RTBF. Une étude du Financial Times citée lors d’un débat récent met en valeur l’importance de la fiabilité des informations pour la nouvelle génération. Les jeunes citent la fiabilité comme leur priorité pour une expérience idéale de l’information en 2030. » Pour gagner leur confiance, même en tant que média traditionnel, il faut faire des efforts « , souligne Mehdi Khelfat.
La « durée de visionnage », c’est-à-dire combien de temps les jeunes passent à regarder une vidéo, est devenue une question clé qu’il faut tenir compte. Il est essentiel de capter l’attention des jeunes et de la maintenir avec une narration engageante. Charlie Danger explique comment elle aborde des sujets qui peuvent sembler niches comme l’histoire ou la science dans un contexte qui intéresse tout le monde.
Néanmoins, pour que ces nouvelles approches de l’information perdurent, la question du financement est l’obstacle majeur, d’après Gaspard G. Chaque créateur a sa propre stratégie et il n’existe pas de « règle universelle », estime Charlie Danger.
Est-ce possible pour les médias conventionnels de s’adapter aux méthodes innovantes et formats récents de communication d’informations ? Au cours de la saison 2022-2023, l’âge médian des spectateurs du bulletin d’information de France 2 était de 63 ans, tandis que celui de TF1 était de 57 ans, comme l’indique Mediamétrie. Ce sont des statistiques qui soulignent à quel point les jeunes ont abandonné certaines sources d’information conventionnelles.
Pour le diffuseur Jean Massiet, qui aborde les nouvelles politiques sur la plateforme Twitch, l’essentiel est de « rejoindre les jeunes là où ils se trouvent et de leur faire confiance lorsqu’il s’agit de s’intéresser à quelque chose qu’ils aiment. »
Il semble qu’une transition générationnelle ait eu lieu : la nécessité constante de personnalisation pour obtenir des informations. Malgré le soutien d’une équipe, Charlie Danger et Gaspard G continuent de seuls personnifier leurs contenus. Comme le remarque Adrien Coussonnet, le créateur du média vidéo local « En Vrai », « Les vidéos les plus populaires sur les réseaux sociaux sont celles où les jeunes se mettent en scène. »
Dans les normes des médias traditionnels, les journalistes sont censés rester anonymes, se mettre en retrait pour que l’information qu’ils partagent ou la personne à qui ils tendent le micro soit au premier plan. « Ce n’est plus le cas aujourd’hui », affirme Adrien Coussonnet, « les jeunes souhaitent renverser les conventions télévisuelles et cinématographiques. » Ils favorisent des contenus plus spontanés, où les gaffes ne sont pas systématiquement éliminées lors de l’édition, ou lorsqu’ils peuvent percevoir une interaction entre le rédacteur et le caméraman.
Il est également vrai que l’incarnation peut exposer davantage à des risques ceux qui y participent. Gaspard G raconte qu’il a une boîte postale qui est située loin de sa maison, suite à des dommages infligés à la sienne par des inconnus. Charlie Danger n’ignore pas non plus les nombreuses offenses sexistes sous ses vidéos qui dépassent le spectre uniquement masculin, par exemple celle sur l’histoire du sport féminin. Sur les plateformes sociales ou ailleurs, la diffusion d’information demeure une lutte constante.
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