Le 22 juin 1899, pendant l’agitation de l’affaire Dreyfus, Pierre Waldeck-Rousseau, un républicain modéré et disciple de Léon Gambetta, a formé un gouvernement dit de « défense républicaine ». Celui-ci comprenait non seulement les amis modérés de Waldeck-Rousseau et leurs adversaires radicaux, mais aussi deux personnalités polarisantes et divergentes : le général Gaston de Galliffet, qui avait un rôle clé dans la répression de la Commune et était détesté par la gauche, et Alexandre Millerand, un proche de Jean Jaurès, qui est devenu le premier ministre socialiste dans l’histoire de France. L’inclusion de Millerand dans ce gouvernement « bourgeois », surtout aux côtés de Galliffet, a suscité l’indignation des socialistes les plus radicaux, en particulier Jules Guesde, qui a considéré ce recrutement comme une trahison.
Néanmoins, Jaurès a soutenu cette action, jugeant qu’il était essentiel de maintenir l’ordre face à la menace que l’extrême droite antidreyfusarde posait à la République. L’histoire a prouvé qu’il avait raison, car ce gouvernement de défense républicaine, avec l’autorité militaire de Galliffet, a réussi à mettre fin à la crise politique causée par l’affaire Dreyfus et a ensuite établi le record de la durée d’un gouvernement sous la IIIe République. Pendant ce temps, Millerand, en tant que ministre du commerce et de l’industrie, a réussi à faire voter plusieurs lois sociales, signe d’un virage vers la gauche dans la politique française.
Dans toutes les propositions émises ces deux dernières semaines, personne n’a évoqué l’option de la « défense républicaine ». Ce modèle pourrait jouer le rôle de prolongation de la rhétorique du « front républicain », qui a favorisé l’établissement initial du Nouveau Front populaire (NFP), malgré ses importantes contradictions internes. Il a ensuite alimenté la dynamique des renoncements de « l’arc républicain », et a finalement conduit à la victoire de la gauche, juste avant la coalition du centre.
D’un autre côté, plusieurs entraves émergent maintenant, rendant difficile de reproduire une situation comparable à celle de Waldeck-Rousseau. La première barrière est sans conteste le succès de la tactique de dédiabolisation et de normalisation initiée par Marine Le Pen depuis des années. Cette stratégie a culminé avec l’ascension politique de Jordan Bardella, considéré comme le « gendre parfait » du Rassemblement national (RN).
Pour lire le reste de cet article, il faut être abonné. Vous avez encore 62,75% de l’article à lire.
Laisser un commentaire