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14 juillet 2024 4 h 09 min

« Piketty: La gauche doit définir l’alternative économique »

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Nonobstant l’acquisition d’une majorité relative par le Nouveau Front Populaire (NFP), l’échiquier politique de la France reste fortement caractérisé par les divisions politiques et l’incertitude. Il faut le dire avec des mots clairs : l’augmentation du nombre de voix et de sièges obtenus par la gauche est en réalité très limitée, témoignant d’un manque d’efforts tant sur le plan du programme que des structures. Seules des attaques déterminées contre ces faiblesses permettront aux partis de gauche de surmonter la période d’instabilité politique et de gouvernements minoritaires qui se profile, leur permettant un jour d’atteindre une majorité absolue pour gouverner solidement le pays à long terme.

Le programme lancé par le NFP peu de temps après la dissolution avait le grand avantage, par rapport aux autres, d’indiquer où trouver des fonds pour investir pour l’avenir : la santé, l’éducation, la recherche, les infrastructures de transport et énergétiques, etc. Ces investissements indispensables vont augmenter de manière significative et il n’y a que deux manières de les financer. Soit on accepte l’entrée dans une nouvelle ère de redistribution croissante des richesses, impulsée par l’augmentation des impôts sur les plus fortunés, comme le suggère le NFP, soit on rejette idéologiquement toute augmentation fiscale, ce qui entraîne alors une dépendance aux financements privés, générant des inégalités d’accès et une efficacité collective douteuse. Alimentées par des coûts privés exorbitants, les dépenses de santé gravitent autour de 20 % du PIB aux États-Unis, avec des indicateurs de performance désastreux.

Malgré les chiffres effrayants présentés par le NFP, comme le prélèvement et les nouvelles dépenses de 100 milliards d’euros au cours des trois prochaines années, représentant 4 % du PIB, ces montants ne sont pas excessifs à long terme. En effet, les revenus fiscaux dans l’ouest et le nord de l’Europe ont augmenté, passant de moins de 10 % du revenu national avant 1914 à 40-50 % depuis les années 1980-1990. Cette croissance est due à l’augmentation des rôles de l’État social en matière d’éducation, de santé, de services publics et de protection sociale, entraînant une augmentation sans précédent de la productivité et du niveau de vie, contrairement aux affirmations des conservateurs de toutes les époques.

La demande de justice sociale est très forte, cependant, l’ordre et le calendrier des priorités pour un gouvernement de gauche qui prend le pouvoir sont incertains. Bien que le pays ait un fort désir de justice sociale, la mobilisation de nouvelles ressources est toujours un processus délicat qui peut perdre le soutien des citoyens à tout moment. En clair, tant qu’il n’a pas été prouvé de manière indéniable que les milliardaires et les multinationales contribuent réellement, il est impensable de demander un effort supplémentaire à quiconque. Malheureusement, le programme NFP reste vague sur cette question cruciale.

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