Le 11 Juillet, le président du Kenya, William Ruto, a démis de leurs fonctions presque tous les membres de son gouvernement, suite aux violentes protestations qui ont causé la mort d’au moins 41 personnes au Kenya deux semaines auparavant. Cette action est une réponse aux manifestants qui, après l’abandon de la loi fiscale fin juin, exigeaient la démission du président.
« Les récents incidents qui ont mené à l’annulation de la proposition de loi fiscale et qui nécessiteront une réévaluation et une réorganisation de notre budget, nous ont poussé à ce point critique », a annoncé M. Ruto, l’air grave, lors d’une conférence de presse à la présidence kényane à Nairobi, expliquant sa décision de licencier le gouvernement, à l’exception de Musalia Mudavadi, Ministre des Affaires Étrangères, et du vice-président Rigathi Gachagua.
En gage d’un nouveau commencement, le président a assuré qu’il formerait un gouvernement d’union nationale pour « mettre un terme au fardeau de la dette, trouver de nouvelles façons de générer des revenus nationaux, supprimer les dépenses superflues et éradiquer le fléau de la corruption ». Cependant, ces propos ne trompent pas le peuple kényan : dans un sondage de 2019, William Ruto était considéré comme le politicien le plus corrompu du pays, une étiquette qui ne l’a jamais quitté.
En limogeant son gouvernement, une décision sans précédent dans le pays depuis 2005, le président affirme vouloir répondre aux préoccupations des jeunes protestataires. « J’ai entendu le peuple kényan », a-t-il assuré lors de son discours. En réalité, le président se trouvait dans une situation sans issue, soumis à la pression d’un mouvement de protestation de la jeunesse kényane jamais vu auparavant.
« Profonde désaffection »
Initialement, il s’est opposé aux protestataires. Le 25 juin au soir, suite à l’entrée forcée des manifestants dans le Parlement et la mort de vingt personnes causée par les tirs de la police, William Ruto a désigné les « protestataires » comme une « menace pour la sécurité nationale », affirmant qu’ils étaient responsables d’« actes de trahison », provoquant des craintes d’une escalade autoritaire. Cependant, face à l’impossibilité de maîtriser ce mouvement inédit, spontané, décentralisé et mobilisé sur Internet, le président a été contraint de faire des concessions.
« Le président a saisi que les protestations ne sont pas qu’un problème à court terme, mais qu’elles reflètent une réelle désaffection des Kényans envers son gouvernement. Le renvoi de son cabinet est un signe qu’il est sur la défensive », commente Awino Okech, Professeure de sciences politiques à l’Ecole d’études orientales et africaines de l’Université de Londres.
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