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« Compromis en France: Synonyme de Faiblesse »

Loïc Blondiaux, un expert en démocratie et engagement civique, est professeur au département de science politique à l’Université Paris-I Panthéon-Sorbonne. En collaboration avec Bernard Manin, il a pris la tête de la compilation de l’ouvrage « Le Tournant délibératif de la démocratie » publié par Les Presses de Sciences Po en 2021.

La question se pose de savoir si la France, avec une Assemblée nationale sans majorité, est devenue ingouvernable. Les résultats des récentes élections législatives reflètent un vote proportionnel avec trois blocs relativement équivalents. Selon les critères d’analyse du pouvoir de la Ve République, cette Assemblée pourrait être perçue comme ingouvernable.

Toutefois, par rapport aux normes de nombreuses autres démocraties européennes, il n’en est rien. Cette assemblée n’est pas plus fragmentée que les parlements allemand ou italien. Leurs députés, élus grâce à un système de vote majoritairement proportionnel, sont capables de former des coalitions gouvernementales beaucoup plus représentatives et efficaces que le système français dominé par un vote majoritaire où le victorieux remporte généralement tout.

Dans le passé, la règle majoritaire dominait notre vie politique, permettant l’émergence d’une majorité claire en faveur du camp présidentiel, sauf en périodes de cohabitation. Aujourd’hui, cette configuration n’existe plus. Aucun groupe politique ne représente aujourd’hui plus d’un tiers des électeurs. Aucun des trois blocs ne peut prétendre à la totalité du pouvoir législatif et exécutif. Cette situation nous présente une opportunité historique pour rompre avec la centralisation du pouvoir et concevoir une forme de parlementarisation de la vie politique française.

Cependant, ces dernières années, nous avons vu combien il est difficile de mettre en place de tels alliances à l’Assemblée nationale. Est-ce que les conditions sont plus favorables de nos jours?

Face à la réalité politique de 2022, la position du président de la République a drastiquement changé. Il ne peut plus agir comme s’il avait une majorité derrière lui et la Constitution l’empêche d’imposer ses volontés.
Nous sommes à une intersection critique avec la tripartition de l’électorat. Par conséquent, l’exercice du pouvoir doit se conformer à la situation politique actuelle. Cela exige une éthique de responsabilité, à la manière de Max Weber, plutôt qu’une éthique de conviction. Autrement dit, il est désormais temps d’accepter les compromis et la négociation.
Cependant, la question se pose de savoir si les acteurs politiques sont à la hauteur de cette tâche.
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