Réécriture:
« 27 juin 2024, Paris
Mes chers lecteurs et lectrices,
Aujourd’hui, je me suis réveillée en lisant le message d’Olga, une amie que j’ai rencontrée lors de mes études de français à Kyïv. Elle m’a contactée alors qu’elle voyagait vers Donbass, la ville où vit son époux, Pavlo. Il a rejoint l’armée. Avant le déclenchement de la guerre, il était responsable de la construction. Elle ne l’a pas vu depuis une période de six mois et dix-neuf jours.
Elle décrit son environnement en ces termes : « Les fleurs sont partout, les champs de tournesols et de blé se mêlent aux cratères de bombes. Des bâtiments avec des fenêtres détruites par des explosions sont visibles partout et, soudainement, on aperçoit un balcon fleuri splendide, comme pour défier les russes [Olga et Sasha ont décidé de ne pas capitaliser « russe » et « russie »]. S’ils n’étaient pas là, je serais heureuse ! Je suis tombée sous le charme du Donbass. Si je pouvais, j’aurais pris une photo. Mais c’est impossible. »
Il y a quelques semaines, j’ai revu Olga à Paris après une séparation de quinze ans. Elle était ici pour le baptême du bébé d’une amie mutuelle. Nos retrouvailles m’ont émue. Quand elle a vu mon nouveau-né, j’ai remarqué une tristesse dans ses yeux. Elle m’a avoué que ces derniers mois avaient été difficiles. « Je suis en voie de perdre la raison. Mon mari est au front depuis presque trois ans. J’aspire à être mère. » Nous sommes restées en contact et, lorsqu’elle est rentrée en Ukraine, je l’ai appelée pour entendre leur histoire. »
Olga, résolument ukrainienne, avait assuré à un ami français le 23 février 2022, au cours de l’assaut des rachistes (un terme combinant « russes » et « fascistes »), qu’elle ne comptait pas quitter l’Ukraine. Cependant, deux jours plus tard, elle et son époux, Pavlo, ont été contraints de fuir Irpine, un faubourg de Kyïv, victime de l’occupation russe pendant plusieurs semaines et théâtre de nombreux crimes de guerre. Leur échappée fut rendue possible grâce à la connaissance de Pavlo des itinéraires discrets dérivés de son hobby, la pêche.
Dans ses affaires hâtivement emballées, Olga n’emporta qu’un recueil d’articles d’Oksana Zaboujko, une auteure engagée, quelques vêtements et quelques produits de beauté, ne s’attendant pas à la prolongation du conflit. Elle rapporte que sa mère, normalement si douce, avait rapidement préparé des cocktails Molotov avec les premières nouvelles de la guerre. Depuis lors, ils ont trouvé refuge à Berdytchiv, environ 180 kilomètres à l’ouest de Kyïv, pendant une dizaine de jours. Après un bombardement à proximité, Pavlo a insisté pour qu’Olga se réfugie en France chez des amis. Il l’a conduite à la frontière dans leur voiture Renault. A l’ultime contrôle de sécurité, on a remis à Pavlo une convocation pour l’armée, et il a choisi de rejoindre le combat. Pour connaître la suite de leur histoire, vous devez être abonné.
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