Roland Dumas était reconnu pour son charme, sa passion pour les stratégies, l’argent et les femmes. Son intelligence astucieuse et son pouvoir d’influence irréfutable l’ont souvent aidé à s’échapper des situations compliquées dans lesquelles il se trouvait à cause de ses intrigues.
Lorsque François Mitterrand l’a nommé à la tête du Conseil constitutionnel en 1995, deux mois avant de quitter la présidence, son arrivée a été accueillie avec des murmures de désapprobation par les gardiens de la Constitution. Ils affirmèrent qu’il lui manquait une qualité fondamentale, celle de la moralité. En tant qu’ancien ministre des affaires étrangères, Dumas n’a rien fait pour les contredire. Moins de cinq ans plus tard, il fut forcé de démissionner à cause de son implication dans le scandale de l’affaire Elf, entouré d’hommes d’affaires de droite et de gauche et de courtisanes de haut rang.
Malgré tout, il continua d’assister aux premières de l’opéra, sa Légion d’honneur se distinguant sur son costume. Durant ses dernières années, avant de mourir à l’âge de 101 ans, il se vantait de mener une vie remplie de hauts et de bas, rien à voir avec une vie ordinaire. Il aimait recevoir chez lui, sur l’île Saint-Louis à Paris, dans un immeuble où avait résidé la sculptrice Camille Claudel et où il collectionnait des tableaux, des gravures et des livres anciens. Son habit d’avocat était pendu à l’entrée. Il avait d’abord essayé le journalisme.
Roland Dumas, qui a vu le jour le 23 août 1922 à Limoges, doit sans nul doute son esprit aventureux à la tragédie qui a marqué son adolescence. Quand son père, Georges Dumas, un fonctionnaire des finances qui avait rejoint la Résistance très tôt, est exécuté par les Allemands en mars 1944, Roland Dumas s’implique lui aussi dans la Résistance. Certes, pas aussi vaillamment qu’il l’a prétendu, mais cela ne l’empêche pas de prendre des risques. En effet, en mai 1942, alors qu’il envisage de boycotter un concert de l’orchestre philharmonique de Berlin avec d’autres étudiants, il est arrêté par la police française et incarcéré au fort Barraux, proche de Grenoble. Cependant, il réussit à s’échapper rapidement, et ce qu’il a vécu durant cette période l’a rendu friand des situations exaltantes dans lesquelles la vie se joue sur un coup de dé.
Une fois la guerre terminée, il décide de se consacrer à des études de droit, puis il poursuit sa formation à l’Institut des langues orientales et à la London School of Economics, grâce à une bourse de deux ans destinée aux enfants de résistants. A son arrivée à Paris, il essaie d’abord le journalisme, à l’Agence économique et financière puis au service étranger de L’Information, précurseur du Nouveau Journal et de La Tribune. Cependant, en 1950, il choisit de se tourner vers le métier d’avocat, car selon lui, cela « correspondait le mieux à ma formation, à mon caractère, à mes ambitions et à mes dons ».
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