La peur et la colère ne sont pas des sentiments judicieux pour guider les décisions. Cependant, lors du premier tour des élections législatives, ces deux émotions ont dominé le vote des Français. La peur est alimentée par le manque de repères dans une période tumultueuse marquée par des tensions géopolitiques dans un monde multipolaire, les transformations démographiques, les mouvements migratoires, le changement climatique, l’intelligence artificielle et les médias sociaux. Ces facteurs remettent en question notre mode de vie sans offrir de solutions facilement applicables pour s’y adapter. La colère, quant à elle, découle de l’impuissance des dirigeants à offrir des perspectives dans cet environnement perturbé.
Sans anticiper les résultats du vote du 7 juillet, un fait est déjà évident : les deux principales forces politiques du premier tour, le Rassemblement national (RN) et le Nouveau Front populaire (NFP), usent de demagogie dans des registres différents pour attirer une opinion désillusionnée et méfiante envers la politique.
D’un côté, la droite extrême propose des solutions simplistes et irréalisables sur des questions de sécurité et d’immigration, qui sont surtout nuisibles à l’unité nationale. Ces idées sont enveloppées dans un discours économique incohérent et sans vision, allant à l’encontre de l’urgence climatique et promouvant un repli isolationniste. Le but est de gagner plus de voix pour le RN en faisant varier les promesses au fur et à mesure que le parti se rapproche des échelons du pouvoir, tout en poursuivant obsessionnellement la « préférence nationale ».
D’un côté, l’unification des diverses factions de gauche sous un programme commun présente des problèmes de cohérence, cachés derrière un élan keynésien désuet et dont l’efficacité et la mise en œuvre sont discutables. Son objectif principal et légitime est de freiner l’ascension de l’extrême droite en France. Cependant, ses solutions pour apaiser les mécontentements – qui sont tout aussi légitimes – ne semblent pas correspondre aux défis auxquels la nation est confrontée.
Ce qui est remarquable dans ces propositions, c’est qu’elles considèrent la France comme déconnectée du reste du globe, libérée de ses responsabilités européennes et sans obligations envers ses prêteurs. Cet écart avec l' »agenda stratégique » européen récemment adopté par les vingt-sept membres de l’Union européenne donne matière à réflexion. Pendant que l’UE se concentre sur la menace d’un décrochage économique européen et se préoccupe de sa souveraineté, la France persiste à débattre de l’utilisation de fonds dont elle ne dispose pas.
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