Marc Ambroise-Rendu, un journaliste fervent défenseur de la nature et de l’environnement, est décédé à Paris le 24 juin à l’age de 94 ans. Issu d’une famille aux antécédents notables comprenant des éducateurs célèbres, des politiciens et des artistes – dont son grand-père maternel, un apprenti du célèbre Jean-Léon Gérôme et peintre orientaliste. Bien que né à Aix-en-Provence le 20 décembre 1929, Marc Ambroise-Rendu s’est toujours considéré comme intimement lié à la vie rurale, ayant un engagement profond envers la vie animale et végétale et leur préservation. Son père, Jean Ambroise-Rendu (1904-1989), a d’ailleurs présidé l’Union Midi-Pyrénées pour la nature et l’environnement de 1970 à 1980.
Après avoir obtenu son diplôme de l’Ecole supérieure de journalisme de Lille en 1954, il a entamé sa carrière à Paris-Presse, un journal créé après la Libération, où il a travaillé comme rédacteur pendant environ quinze ans. Par la suite, il a rejoint la revue mensuelle Constellation en tant que reporter de janvier 1970 à février 1971. Suite à sa fusion avec Lectures pour tous, Marc Ambroise-Rendu a été nommé rédacteur en chef adjoint jusqu’à la cessation de la publication en mars 1974.
C’est une période clé pour le journaliste. En même temps, il métamorphose le magazine Mieux Vivre, consacré aux associations environnementales qu’il a créé en 1971, en une publication trimestrielle, Combat Nature, qui a été publié de 1974 à 2005. Cette publication est contemporaine de la lente prise de conscience de la question écologique dans la mentalité collective française. Au printemps 1974, Marc Ambroise-Rendu rejoint Le Monde en tant que rédacteur du service Société. Son intérêt pour l’écologie le pousse à mettre en place une rubrique spécifique entre 1974 et 1982. Celà positionne Ambroise-Rendu pour suivre attentivement la campagne présidentielle déclenchée par la mort de Georges Pompidou le 2 avril 1974. Pour la première fois, l’écologie est représentée par René Dumont.
Nécessité
Lors de la première conférence de presse du candidat écologiste à l’Institut Agronomique, Ambroise-Rendu remplace le représentant du service politique qui n’avait pas prévu d’assister. L’humour et le ton de Dumont, ainsi que ses remarques et son entourage, sont si différents qu’ils poussent finalement le quotidien, peu enclin à couvrir cette apparition surprise, à admettre que le phénomène, aussi inhabituel soit-il, était important et donc nécessaire.
Trois ans après l’admission par le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas de la nécessité d’un nouveau ministère dédié à la protection de la nature et de l’environnement, remis au gaulliste Robert Poujade, l’apparition de l’agronome portant le flambeau de l’écologie finit de persuader Jacques Fauvet, successeur d’Hubert Beuve-Méry, de l’importance de ce nouveau domaine d’intérêt. C’est ensuite à Ambroise-Rendu de déterminer comment il sera traité : une part égale sera accordée aux informations fournies par les associations et les institutions dans les articles.
C’est une véritable transformation pour Le Monde, qui inclut désormais des reportages et fait entendre les voix habituellement silencieuses de ceux qui se battent contre la pollution de l’eau, le bruit et l’altération du paysage côtier par de néfastes projets immobiliers. Cependant, la tâche consiste à sélectionner parmi les nombreuses protestations pour ne se concentrer que sur les problèmes les plus importants.
Regard perspicace
Il est davantage question d’une information critique pour apporter un changement, semblable à la perspective individuelle de chacun. Ambroise-Rendu, dans une position stricte de témoin, évite toute implication jusqu’à son départ de Le Monde en 1995. Ainsi, la déviance apparente vue dans son réception de la Légion d’honneur, « au nom de l’environnement », au siège du journal, dans le bureau propre de Jacques Fauvet, est justifié comme un acte de militantisme interne, destiné aux 40% de la rédaction qui refusent de reconnaître sa rubrique, y voyant une indication de la « décadence du journal », témoigne le récipiendaire, pointant le soulèvement mené par les économistes du journal.
Dans une interview parue dans Le Temps des médias en 2015, Marc Ambroise-Rendu analysait l’origine des résistances auxquelles il était confronté : « Le sujet de la crise environnementale déconcerte les journalistes. Il touche à tout (politique, économie, affaires étrangères, culture, social, science), mais il ne s’adapte à aucune catégorie, c’est un objet médiatique non identifié, on ne sait pas à quel département le confier. Il reste relégué au marais des ‘faits divers’. »
Ayant un esprit vif et une vision claire, la situation délicate d’un journaliste qui prévoit et observe l’aggravation des dangers sans l’assurance d’être compris a été sa réalité. Cependant, il n’a jamais abandonné son engagement, particulièrement notable lorsqu’il a arrêté le journalisme pour se consacrer à la défense de l’environnement, le combat de toute sa vie.
Marc Ambroise-Rendu était un précurseur en matière de couverture des questions environnementales au journal. Le journal « Le Monde » adresse ses condoléances les plus sincères à sa famille, à ses proches et à tous ceux qui ont eu l’opportunité de le connaître.
Le 20 décembre 1929, il naît à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). En 1971, il crée le magazine environnemental « Mieux vivre ». De 1974 à 1995, il était rédacteur, puis reporter pour « Le Monde ». En 2007, il publie « Des cancres à l’Elysée. Cinq présidents de la République face à la crise écologique » (Jacob-Duvernet). Il meurt à Paris le 24 juin 2024.