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« Mythologie égyptienne alimentant pensées suprémacistes »

Jean-Loïc Le Quellec, un mythologue reconnu, mène une double vie académique. D’une part, il est considéré comme l’un des éminents experts français dans son domaine, ayant publié des œuvres phares comme son Dictionnaire critique de mythologie (aux côtés de Bernard Sergent, CNRS Editions, 2017) et La Caverne originelle. Art, mythes et premières humanités (La Découverte, 2022). D’autre part, en tant que directeur de recherche émérite au CNRS, il prend plaisir à débusquer les « fausses informations archéologiques » qui alimentent notre culture actuelle. Suite à son livre Des Martiens au Sahara (Editions du Détour, 2023), il nous offre une enquête surprenante sur l’égyptomanie dans Nos ancêtres les pharaons. Cinq siècles d’illusions sur l’Égypte ancienne (Editions du Détour, 2024, 280 pages, 22,90 euros).

Quand on lui demande pourquoi il s’est intéressé aux mythes propagés sur l’Égypte, Le Quellec répond : L’utilisation de l’archéologie pour construire des mythes m’a toujours fasciné, mais l’idée de ce livre a été suscitée par l’immense controverse autour des déclarations du rappeur Gims. En avril 2023, lors d’une interview sur la chaîne YouTube « OuiHustle », Gims a prétendu que l’Egypte antique avait de l’électricité. Comme beaucoup, j’ai d’abord ri, puis j’ai commencé à suivre la vague de réactions provoquées par cette déclaration.

Rapidement, deux questions m’ont poussé à creuser plus profondément. Premièrement, l’origine de cette croyance que Gims n’a certainement pas créée. Deuxièmement, je voulais comprendre pourquoi cette sottise avait suscité un dédain qui n’était jamais retombé sur des absurdités similaires, comme le discours de Nicolas Sarkozy à Dakar en 2007. Ce discours n’a provoqué qu’une indignation marginale, même si c’était une bêtise symétrique à celle de Gims : lorsque l’ancien président affirmait que « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire », le rappeur déclarait, de son côté, que « l’Afrique, c’est l’avenir ».
Cette obsession pour l’Egypte a un nom : l’égyptomanie. Quelle est la structure de cette croyance?
Des Grecs, avec Hérodote [vers 484-425 av. J.-C.], aux Romains – qui ont volé des obélisques pour les ramener à Rome -, cette fascination pour l’Egypte remonte à l’Antiquité. Bien que le terme égyptomanie ait été attesté tardivement, en 1797, l’attraction pour les motifs égyptiens – pyramides, sphinx, statuettes – s’est également manifestée à la Renaissance, pour atteindre une ampleur inédite à partir de la campagne de Napoléon en Egypte (1798-1801).
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