Est-ce que quelqu’un ose encore ridiculiser le vin rosé? A l’heure actuelle, il est le vin le plus vendu en France, constituant un tiers de toutes les bouteilles vendues. C’est le choix préféré des jeunes pour sa couleur séduisante. Sa consommation globale a augmenté de façon spectaculaire de 25% depuis le début du nouveau millénaire. La France n’est pas seulement la plus grande productrice de vin rosé sur terre (35% en 2020), mais aussi la principale exportatrice en termes de valeur.
La Provence, notamment, a tiré grand profit de cette tendance. Connue pour son atmosphère estivale et de vacances, cette région est la star des terrasses ensoleillées. De nombreuses célébrités ont investi dans des vignobles locaux qui ont connu un succès fulgurant tout en augmentant l’attrait glamour de ce type de vin. À l’étranger, les vins rosés de Provence sont vénérés et considérés comme l’étalon-or des rosés haut de gamme. La Provence elle-même se concentre principalement sur la production de rosé, avec 90% de sa production viticole dédiée à ce type de vin.
Ce serait facile d’oublier que ce succès n’a que deux décennies environ. Tous les viticulteurs se souviennent encore du moment où la donne a changé. Jean-Pierre Daziano, du Domaine de La Fouquette dans le massif des Maures, en est un exemple vivant. Il dit, « Je l’ai vu de mes propres yeux, ce boom du rosé ». Quand il a rejoint le domaine de ses beaux-parents en 2009, la popularité du rosé n’était pas encore à son apogée. Leur réussite est arrivée peu de temps après, grâce à un importateur américain qui a d’abord commandé quelques centaines de bouteilles pour tester. Il raconte, « cela nous a ouvert les portes du marché américain. Chaque année, nos expéditions doublaient, au point où nous avons dû les restreindre! »
Ce parcours n’a pas été facile.
Cheminant vers la victoire n’a pas été simple, tout particulièrement pour Hélène Dragon, cheffe du Domaine Jacourette, niché au pied de la Sainte-Victoire dans les Bouches-du-Rhône. Elle a pris les rênes de l’entreprise familiale en 1997. Sa participation à différentes foires s’est trouvée métamorphosée par l’attitude condescendante de ses pairs vignerons qui n’ont guère pris en considération ni elle, ni son vin. De surcroît, les médias de l’époque ne se révélaient pas plus cléments et le rosé était souvent l’objet de moqueries, étant considéré comme une simple mode éphémère.
Malgré toutes ces entraves, le vin rosé a connu une ascension en popularité insoupçonnée au point de ne plus pouvoir être dédaigné. Jérémy Arnaud, fondateur de l’Association internationale des rosés de terroirs, affirme que les consommateurs ont soutenu ce vin contre toute attente et ont exprimé leur préférence aux producteurs, allant à l’encontre des prévisions du domaine viticole. Soulignant le caractère « décontracté et fédérateur » du rosé, Arnaud est convaincu que ce vin est devenu le symbole d’une époque en mutation, prête à révolutionner le monde viticole. Réservez la suite de cet article aux abonnés pour obtenir les 68.24% restants.
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