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24 juin 2024 22 h 06 min

« L’homme en Islam: Nature Humaine »

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Dans son livre récent, « L’Arrivée de l’homme en Islam et sa disparition », Houari Touati conteste l’idée de Michel Foucault que l’homme en tant que concept a émergé en Europe à la fin du 18ème et au début du 19ème siècle. Touati, un expert de l’époque médiévale islamique et directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales, fait valoir que ce concept trouve ses racines dans l’ancienne Grèce, spécifiquement dans l’Alcibiade de Platon.

Touati prétend que cette tradition philosophique a été transmise à Bagdad au 8ème siècle par le biais de traductions arabes, posant ainsi les fondations d’une « science humaine » dans le monde musulman. Conçue comme un complément à la science divine, cette philosophie a acquis une indépendance significative, permettant à la philosophie de se développer en tant que discipline distincte de la théologie, et construire une doctrine du salut basée sur la raison.

Cela marque un basculement anthropologique important. La moralité de l’homme n’est plus définie par l’obéissance à des normes éthiques transmises par une loi révélée, mais plutôt par son sens de la raison, qui lui permet de distinguer le bien du mal, de trouver sa place dans le monde, et de se distinguer de l’ordre naturel.

Houari Touati dévoile habilement l’évolution et la formation de cette étude de l’humanité, non seulement parmi les penseurs islamiques qui ont ouvertement adopté l’héritage grec, comme Al-Farabi (872-950) et Avicenne (980-1037), mais aussi au sein des premiers théologiens rationalistes, les Mutazilites. Cette école de théologie, qui met l’accent sur la prédominance de la raison dans l’interprétation des écrits sacrés, s’impose au huitième siècle et atteint son apogée au neuvième siècle, avant d’être éclipsée par une autre branche de la théologie rationaliste, l’Acharisme, qui préfère mettre en avant la toute-puissance de Dieu plutôt que de valoriser la raison humaine.

Un débat essentiel

À travers une recherche prudente et cultivée, l’auteur démontre comment, du huitième au douzième siècle, les théologiens et les philosophes, s’appuyant sur un corpus philosophique et scientifique grec traduit en arabe, ont exploré les caractéristiques uniques à l’homme. Le débat est de grande importance. Si l’homme possède une nature spécifique, qu’elle soit identifiée par la raison (le logos), le rire ou sa capacité à utiliser ses mains, cette nature peut faire l’objet d’une étude scientifique. Par conséquent, l’anthropologie, la psychologie, l’embryologie et la science politique, en bref, les « sciences humaines », ont alors trouvé leur voie dans les débats théologiques.

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