Il est indéniable que les municipalités ne peuvent pas remplacer la force de police nationale et gérer les opérations de démantèlement des réseaux de drogues. Cependant, il ne fait aucun doute que les maires, en tant que premier niveau local de l’État, sont la première ligne de défense contre la narco-État qui est de plus en plus discutée. Les municipalités doivent montrer un exemple irréprochable et intransigeant dans la lutte contre l’augmentation de l’infiltration des narcotrafiquants.
Dans leur ville de Canteleu (Seine-Maritime), l’ex-maire Mélanie Boulanger, 47 ans, et son ancien adjoint de commerce Hasbi Colak, 41 ans, n’ont pas respecté cette obligation, selon la procureur Alice Dubernet, qui a demandé des peines d’emprisonnement avec sursis allant jusqu’à douze et dix-huit mois respectivement pour eux, le lundi 24 juin, devant la 13e chambre du tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis).
L’avocat de l’accusation a consacré le dernier des quatre heures de son plaidoyer intense aux deux responsables, encore membres du conseil municipal, les trois premières heures étant réservées aux seize autres inculpés jugés pour leur implication plus ou moins importante dans l’organisation d’un vaste réseau de drogues contrôlé par la famille Meziani, contre qui des peines allant de deux ans avec sursis à dix ans de prison ferme et une amende de 2 millions d’euros ont été demandées.
Alice Dubernet a commencé en se concentrant sur le cas de Hasbi Colak, surnommé « l’enfant du quartier », un modèle de « méritocratie à la française », qui a fréquenté les mêmes écoles que les Meziani mais avait réussi à rester dans la légalité. Choisi comme adjoint grâce à ses « contacts que d’autres n’ont pas », il a été rattrapé par ses liens avec le quartier à un point tel que, selon le procureur, il est devenu « l’intermédiaire des Meziani auprès de la mairie ».
Dans son affirmation, elle a fait savoir qu’à cause de son statut de fils du terroir, de ses liens intimes avec les Meziani et du rôle que la mairie lui a conféré pour entretenir ces relations déconseillées dans le but d’obtenir des informations de terrain, Hasbi Colak a glissé dans une spirale. Il a été piégé par le trafic de drogue, où il s’associait avec les trafiquants. En prêtant sa voiture à un membre proche des Meziani pour une transaction de cocaïne, en soutenant les demandes de logement social déposées par le clan (l’un des appartements sera utilisé pour préparer la drogue) et en informant les Meziani de la présence policière (comme en témoignent les écoutes téléphoniques), Hasbi Colak a posé « des actes concrets qui ont soutenu et favorisé la continuité du trafic », selon la procureure. Lors de l’audience, l’accusé avait déclaré ne pas savoir à quoi devaient servir sa voiture et cet appartement, tout en avouant avoir « fait des choses pour les Meziani qu’il n’aurait pas dû faire ». La suite de cet article est accessible uniquement aux abonnés.
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