La petite ville de Blendecques, situee dans le Pas-de-Calais, a vécu en première ligne les dégâts d’inondations récurrentes lors de l’automne et l’hiver 2023-2024, conséquences alarmantes du rechauffement climatique et d’une désastreuse gestion territoriale. Cependant, les citoyens de cette ville ont majoritairement soutenu le Rassemblement National (RN), formation politique largement sceptique envers l’écologie, lors des récentes élections européennes, révélant ainsi un paradoxe étonnant. D’un autre côté, la popularité des partis politiques centrés sur la question environnementale a drastiquement chuté.
En milieu de juin, mon confrère Stéphane Mandard s’est rendu à Blendecques, muni d’un carnet et d’un stylo, afin d’examiner de plus près la situation politique locale. Ses observations ont révélé que le parti écologiste, qui avait recueilli 7,1 % des votes en 2019, n’a pu rassembler que 1,7 % des suffrages le 9 juin, une proportion moindre même que l’Alliance rurale (2,5 %), le Parti animaliste (2,2 %) et les votes nuls (2,5 %) et blancs (2,2 %). En revanche, le RN s’est largement imposé avec 50,7 % des votes. À la lumière des témoignages recueillis sur place, une vague de résignation et de sentiment d’abandon semble balayer Blendecques, avec un ressentiment curieusement dirigé vers les écologistes.
Selon une résidente locale, la communauté est furieuse envers les écologistes qui semblent privilégier la préservation des grenouilles plutôt que celle des habitations, en interdisant les opérations de nettoyage pendant les saisons de reproduction de ces amphibiens. Ce sentiment a été alimenté par le travail soutenu de Xavier Bertrand, président (Les Républicains) de la région, qui a réussi à diriger les accusations de responsabilité pour les inondations répétitives qui ont assailli des milliers de foyers du Pas-de-Calais pendant plusieurs mois, vers les écologistes.
En réalité, les facteurs liés aux inondations récurrentes dans la région ne sont pas tant en lien avec le nettoyage des fossés et la protection des grenouilles, mais plutôt avec les politiques publiques mises en oeuvre depuis des décennies. On observe notamment un pourcentage de sols bétonnés inhabituellement élevé dans le Nord (22%) et le Pas-de-Calais (15%), comparé à la moyenne nationale (10%). C’est également dans cette partie de la France que l’agriculture industrielle a fortement favorisé l’expansion des terrains, qui, couplée au défrichement des haies, à l’aplanissement des reliefs, et à l’imperméabilisation des terres arables détériorées par un demi-siècle d’utilisation de pesticides, a mené à une loss de résilience des paysages face aux précipitations extrêmes amplifiées par le changement climatique.
Cela a abouti à une véritable crise de compréhension du monde. La lecture complète de cet article est réservée aux abonnés.
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