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« Retour des États-Unis aux Philippines »

A 81 ans, Edicio Dela Torre est toujours surpris de sa situation. « J’ai été détenu pendant neuf ans sous la dictature de Ferdinand Marcos. Et maintenant, je trouve une certaine proximité avec son fils [le président philippin, Bongbong Marcos] et les États-Unis. Est-ce que le patriotisme tardif existe ? », se demande-t-il, souriant légèrement, avec ses cheveux gris peignés en arrière, dans les locaux du Mouvement de reconstruction rurale des Philippines, un groupe de gauche qu’il préside pour aider les paysans, situé dans la grande Manille. Edicio, ancien prêtre et combattant pour la démocratie, coorganise avec le groupe social-démocrate Akbayan, un nouveau mouvement de citoyens appelé Atin Ito, qui signifie « C’est à nous ! » en tagalog. Atin Ito a orchestré deux expéditions en mer de Chine méridionale pour soutenir les pêcheurs et les garde-côtes philippins face à l’intervention navale chinoise près de deux atolls que la Chine souhaite interdire aux Philippins: Second Thomas Shoal en décembre 2023, et Scarborough Shoal le 15 mai. Ces deux atolls se trouvent dans la zone économique exclusive (ZEE) des Philippines, soit à une distance allant jusqu’à 200 milles marins (370 kilomètres) de la côte.

Avec l’accord des autorités philippines, les flottilles de manifestants se sont tenues à plusieurs dizaines de milles des atolls concernés. La prudence est toujours de rigueur face à la Chine, qui a déployé des dizaines de navires de garde-côtes pour bloquer les manifestants. La Chine a autorisé, après l’expédition au Scarborough Shoal, ses garde-côtes à « détenir sans procès pendant 60 jours quiconque est soupçonné d’avoir franchi illégalement ses frontières ». Cette mesure a été mise en place le 15 juin.

La nouvelle a suscité l’outrage parmi la population Philippine. Leonardo Cuaresma, le dirigeant d’une organisation indépendante de pêcheurs de Masinloc, ville côtière en face de l’atoll de Scarborough, s’est énervé le 7 juin, déclarant: « Ils n’ont pas le droit d’affirmer cela. C’est à nous de les stopper ! ». A peu de distance de sa demeure en béton, des bankas colorés portant les noms d’« Iresse » et de « Jolynna » sont posés sur la plage grise. Ces embarcations aux flotteurs en bambou sont utilisées par les pêcheurs pour se rendre à l’atoll, en suivant un « navire mère » plus grand, après plus de vingt heures de voyage. Ils y pratiquent la pêche avec des fusils à harpon et des filets. Cuaresma signale que le lagon de l’atoll est leur seul refuge en cas de mauvais temps : « L’accès est devenu extrêmement dangereux depuis que les Chinois nous empêchent d’y aller », accuse-t-il.
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